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Friday, April 23, 2010

Alain de Benoist-JULIUS EVOLA



Alain de Benoist
JULIUS EVOLA, REACTIONNAIRE RADICAL ET 
METAPHYSICIEN ENGAGE 

Analyse critique de la pensée politique de Julius Evola 

Le texte ci-dessous a été rédigé pour servir de préface àl' édition définitive d' « Orientations »et des« Hommes au milieu des ruines »dans un volume des« Opere di JuliusEvola »qui aparuen janvier 2002 aux éditions Mediterranee, de Rome. 

DansLecheminduCinabre, Evolaracontequ’il eut lasurprise, àsonretour à 
Romeen1948(1), deconstater qu’il existait encoreenItalie« desgroupes, de 
jeunessurtout, qui nes’étaient paslaisséentraînerdansl’écroulementgénéral. Dans 
leursmilieuxtout particulièrement, monnométait connuet meslivresétaient très 
lus »(2). C’est àl’intentiondecesjeunesgens, commeil devait leconfirmer par la 
suiteàplusieursreprises(3), quel’auteur deRévoltecontrelemondemoderne 
décidaderédiger, d’abordlabrochureintituléeOrientations, dont lapremièreédition 
parut en1950àl’initiativedugroupefondateur delarevueImperium, quedirigeait 
alorsEnzoErra, puis, troisansplustard, lelivreLeshommesaumilieudesruines
qui fut publié aux éditions romaines dell’Ascia. 
Aveccesdeuxouvrages, Evolavoulait répondreàlademandequesesjeunes 
lecteurslui avaient faiteenvued’obtenir delui des« directivescapablesdedonner 
uneorientationpositiveàleur activité ». Lui-mêmedevait décrireOrientations, dans 
la préface qu’il rédigea pour l’édition de 1971, comme une « rapide synthèse 
provisoire de quelques points essentiels et généraux », synthèse destinée à 
proposer, non pas tant des mots d’ordre ou un programme politique, que des 
« consignes »àvaleurexistentielleàdestinationde« ceuxqui surent combattretout 
enétant conscientsquelabatailleétait matériellement perdue ». Maisc’est aussi 
danscepetit livrequ’il écrivait leslignessuivantes : « Noussommesaujourd’hui au 
milieud’unmondederuines. Et laquestionqu’il faut seposer est celle-ci : existe-t-il 
encoredeshommesdebout parmi cesruines ?Et quedoivent-ilsfaire, quepeuvent- 
ilsencorefaire ? »Leshommesaumilieudesruinesdevait lui permettrederépondre 
plus complètement à cette question 
Comptetenudecequi précède, onpourrait êtretentédeconsidérer Orientations 
et Leshommesaumilieudesruinescommedesimplesécritsdecirconstance. Ce 
serait une erreur, pour au moins deux raisons. La première est l’influence 
considérablequecesdeuxouvragesn’ont cesséd’exercerdepuisl’époqueoùilsont 
étéécrits. Ainsi qu’entémoignelegrandnombred’éditionset detraductionsdont ils 
ont fait l’objet (4), Orientations et Les hommes au milieu des ruines ont 
incontestablement servi de « lectured’éveil » à plusieurs générations de jeunes 
gens, issustout particulièrement desmilieuxdeladroiteradicale.Ilsytrouvaient une 
synthèse, relativement faciled’accès, desidéespolitiquesdeJuliusEvola, etil nefait
pasdedouteque, dansbiendescas, c’est par lalecturedeceslivresqu’ilsont 
commencéàsefamiliariseraveclapenséeévolienne, dont ilsnedevaient découvrir 
que par la suite les autres aspects, plus proprement métaphysiques. 
Laseconderaisonest quecesdeuxlivressont loindeconstituerunblocmarginal 
ouisolédansl’œuvred’Evola. Celui-ci n’aeneffet pratiquement jamaiscessé, au 
moinsdepuisledébut desannéestrente, sinonlafindesannéesvingt, d’écriredes 
textes à caractèredirectement politique. Ce trait est mêmel’un deceux qui le 
distinguent leplusnettement ducourant depensée« traditionaliste »auquel onle 
rattachegénéralement. Contrairement aux autres théoriciens de la Tradition, de 
René Guénon à Frithjof Schuon, Evola a constamment pris position sur les 
problèmespolitiqueset adoptélui-mêmedespositionspolitiques, notamment dans 
sesarticlesdejournauxet derevues, dont laplupart n’ont étéréunisenvolume 
qu’aprèssamort (5). Cetteparticularité, qui apufaireconsidérersonœuvrecomme 
un« surprenant mélanged’inactualitéaristocratique, d’intempestivitésouveraineou 
desupra-historicitémétaphysique, et d’implicationcontinuéedans les problèmes 
d’actualité, d’engagement danslechampidéologico-politique »(6), est àmettreen 
rapport, àn’enpas douter, avecsavolontédes’affirmer commeun« guerrier » 
(kshatriya)plutôtqu’un« prêtre »—et parsuiteavecsonaffirmation, si contraireaux 
vuesdeRenéGuénon, selonlaquelleleguerrier ouleroi est porteur, dans les 
sociétés traditionnelles, d’un principe spirituel de dignité égale à celle du sacerdoce. 
Cet intérêt est mêmesi constant chezlui qu’onpeut parfoissedemander s’il faut 
leconsidérer commeunpenseur delaTraditionparticulièrement intéressépar la 
politiqueoucommeunthéoricienpolitiquequi seréfèreauxprincipesdelaTradition. 
Maisledouteest levédèsquel’onvoit quelledéfinitionEvoladonnedelapolitique. 
Cettedéfinitionsuffit eneffet àlefairereconnaîtrecommeunmétaphysicien— 
« métaphysicienengagé »sansnul doute, maisd’abordet avant tout métaphysicien. 
Contrairement à un politologue comme Julien Freund, pour qui le politique est 
« originairement substantiel àlasociétéentant qu’essence »(7) et qui soutient le 
caractèrestrictement autonomedecetteessence, Evolafait partiedesauteursqui 
reconduisent ouramènent lepolitiqueàuneautreinstancequelasiennepropre. 
Selonlui, lapolitiquerelèveendernièreanalysedel’éthiqueet delamétaphysique : 
ellenereprésentequel’applicationdansundomaineparticulierdeprincipesqui, loin 
delacaractériser oudelui appartenir enpropre, trouvent endehors d’elleleur 
origine, leur signification et leur légitimité. 
Tandisquepour JulienFreund, lapolitiqueest « l’activitésocialequi sepropose 
d’assurer par laforce, généralement fondéesur ledroit, lasécuritéextérieureet la 
concordeintérieured’uneunitépolitiqueparticulièreengarantissant l’ordreaumilieu 
deluttes qui naissent de ladiversité et deladivergences des opinions et des 
intérêts »(8), elleest pour Evolal’« applicationdes directivesdusupra-monde », 
c’est-à-direuneactivitémiseenœuvrepar uneautoritédont lefondement nepeut 
êtreque« métaphysique »(9), autoritéassimiléeàune« qualitétranscendanteet 
nonuniquement humaine »(10). « Lefondement detout véritableEtat, écrit Evola, 
c’est latranscendancedesonprincipe »(11). Il s’endéduit quelesrèglesdel’action
politiquenesont pasautonomes, maisdérivées. Lapolitiquen’est pasensonfond 
politique, maismétaphysique : entant qu’elleest une« traduction », ellen’apas 
d’essencepropre. C’est pourquoi, assureEvola, lemétaphysicienest mieuxplacé 
que personne pour dire en quoi elle doit consister (12). 
Le primat de l’Etat 
Leshommesaumilieudesruinesest unlivrequi portemoinsqu’onnepourrait le 
croire la marque de l’époque à laquelle il fut écrit. C’est d’ailleurs sans doute la raison 
pour laquelle il a pu être lu avec un égal intérêt par plusieurs générations 
successivesdelecteurs. Onnesaurait s’enétonner danslamesureoù, d’emblée, 
Evolas’ysituefondamentalement auniveaudesprincipes. C’est particulièrement 
vrai desonzepremierschapitres, danslesquelsil exposeprécisément cequesont 
ces principes —terme qui, chez lui, a toujours le sens d’idées ou de règles 
supérieuresabsolues. Ladeuxièmepartie, qui traiteaussi bienducorporatismeque 
dela« guerreocculte », est enrevancheplusdisparate, plusinégale, et c’est sans 
doute celle qui pourra paraître aujourd’hui comme ayant le plus « vieilli ». 
Ondoit fairecrédit àEvolades’exprimer toujourssansfard, sansconcessions 
tactiquesni àlaconjonctureni àl’impressionquesespropospourraient produire. 
PhilippeBaillet apuparler àcet égardd’un« styleextrêmement dépouillé, parfois 
hautainet solennel, mais, mêmedanscecas, privédetout artificelittéraireet de 
toute rhétorique facile » (13). Evola est d’ailleurs le premier, non seulement à 
reconnaîtresonradicalisme, maisàs’enfairegloireet àleprôner àceuxqui le 
lisent : « Nous, nous devons avoir en propre le courage des choix radicaux (il 
coraggiodel radicalismo), lenonlancéàladécadencepolitiquesoustoutes ses 
formes, qu’ellessoient degaucheoud’unesoi-disant droite »(14). Nousauronsà 
reparlerplusloindeceradicalisme. Disonstout desuitequ’il doit avant tout êtremis 
enrapport aveccequ’Evolaappellel’« intransigeancedel’idée ». L’idée, pourEvola, 
nesaurait êtreleproduit descirconstances. Elleappartient et tient sonorigined’une 
sphère détachée de toutes les contingences, et même de toute autre forme 
d’appartenance : « L’idée, et l’idée seule, doit représenter la vraie patrie » (15). 
Cette façon d’aborder les choses explique l’économie générale d’un ouvrage 
commeLeshommesaumilieudesruines. Pour traiter depolitique, Evolanes’y 
réfèreàpresqueaucungrandthéoricienclassiquedelachosepublique. S’il fait état 
dupeudesympathiequ’il apour Machiavel, s’il évoqueàl’occasionJean-Jacques 
Rousseau, il passesoussilencelesnomsdeLocke, Hobbes, Althusiuset Bodintout 
autant queceuxdeTocquevilleoudeMaxWeber. Il soulignequel’économiqueest 
pourlui un« facteursecondaire »,maisil neproduit pasderéfutationargumentéede 
lapenséed’AdamSmithoudecelledeKarl Marx, pasplusqu’il n’examinedansle 
détail les rapports complexes dupouvoir politiqueet dudomainejuridique. Son 
propos, encore une fois métaphysique avant tout, ne s’éclaire guère que des 
expériencespolitiquesqu’il aeuàconnaîtredurant lesannéestrente. Il n’yapasde 
cepoint devuedethéorieproprement politologiqueàrechercherchezlui. Demême,
il se soucie assez peu de transcrire au niveau des applications concrètes les 
principesnormatifsqu’il énonce. Quandil s’yessaie, àdetrèsraresexceptionsprès, 
ses propositions revêtent le plus souvent un caractère très général (16), voire 
énigmatique (17). 
Bref, Evolas’efforcederestertoujoursauniveaudecequi est pourlui l’essentiel. 
Mais quel est l’essentiel ? 
Onsait quepour Evola, toutel’histoirehumainedepuisdeuxmillénaireset demi 
peut selirecommeunprocessusd’involution, assezlent d’abord, puisdeplusen 
plusaccéléré, et qui culminedanslamodernité. Ceprocessusdedécadenceobéit à 
laloi de« régressiondescastes », qui afini par consacrer lesvaleursmarchandes, 
économiques—qui pourEvolasont aussi cellesdelafemmeet dupeuple—et par 
donner le pouvoir à leurs représentants. Il se caractérise par une progressive 
déperditiondel’élément spirituel, viril et héroïque, caractéristiquedela« Lumièredu 
Nord », et par une montée corrélative des valeurs dissolvantes des cultures 
« gynécocratiques »duSud. Sonrésultat est l’effacement des« visionsdumonde » 
(Weltanschauungen) impersonnelles, ordonnées à des principes métaphysiques 
supérieurs, auprofit duseul savoir livresqueet del’intellectualismeabstrait, mais 
aussi le primat del’« âme », domaine des pulsions instinctives et des passions 
indifférenciées, sur l’« esprit », domaine de la clarté « apollinienne » et de la 
rationalité. Pour Evola, ceprocessusconstitueunfait premier, qui justifieleregard 
péjoratif qu’il portesur l’histoire : celle-ci n’est qu’histoired’undéclintoujoursplus 
accentuéet, inversement, ledéclincommencedèsquel’hommeveut s’inscriredans 
l’histoire. 
Cettevisions’inscrit elle-mêmedansunestructuredetypeàlafoisdualisteet 
hiérarchique. Tout le système d’Evola se fonde sur une double opposition : d’une part 
entrecequi est « enhaut »et cequi est « enbas », d’autrepart entrelaplus 
lointaine origine (ce qu’il appelle la « Tradition primordiale ») et la fin de cycle 
actuelle. Les termes de cette opposition se recouvrent : l’origine renvoie aux 
principesfondateurssupérieurs, l’état deschosesprésent àl’abaissement final. La 
décadence se résume dès lors au mouvement ascendant de la base et au 
mouvement descendant du sommet. 
Lapenséeévolienneseveut bienentendufondamentalement orientéevers le 
haut, c’est-à-dire rigoureusement élitiste et « hiérarchiste ». Evola rappelle 
qu’étymologiquement, « hiérarchie » signifie « souveraineté du sacré ». La 
perspectivehiérarchiquedoit doncs’entendreàlafoisdansunsenssynchronique 
(« plus la base est vaste, plus le sommet doit être haut »), et dans un sens 
diachronique, lepasséétant par définitiontoujours meilleur queleprésent —et 
mêmed’autant meilleurqu’il est pluséloigné. L’idée-cléest ici quel’inférieurnepeut 
jamaisprécéder lesupérieur, car leplusnesaurait sortir dumoins. (C’est laraison 
pour laquelle Evola rejette la théorie darwinienne de l’évolution). Adversaire résolu de 
l’idéed’égalité, Julius Evolacondamnedonc avec force touteforme depensée
démocratiqueet républicaine—lesrépubliquesdel’Antiquitén’étant selonlui que 
desaristocratiesoudesoligarchies—, tant parcequedetellesformesdepensée 
proviennent du« bas »queparcequ’ellessont desproduitsdelamodernité, les 
deux raisons n’enformant d’ailleurs qu’une à ses yeux. L’histoire étant conçue 
commechuteaccélérée, il n’yadèslors, dulibéralismeaubolchevisme, qu’une 
différencededegré : « Libéralisme, puisdémocratie, puissocialisme, radicalisme, 
enfincommunismeet bolchevismenesont apparusdansl’histoirequecommedes 
degrésd’unmêmemal, desstadesdont chacunpréparelesuivant dansl’ensemble 
d’un processus de chute » (18). 
Faceàcetteévolutionnégative, Evolaplaceenpolitiquetoussesespoirsdans 
l’Etat. Maispuisquepour lui c’est toujoursle« bas »qui doit dériver du« haut », et 
non l’inverse, il importe que cet Etat ne procède d’aucun élément « inférieur ». 
Rejetant touteslesdoctrinesclassiquesqui font del’Etat laformeorganiséedela 
nation, leproduit delasociétéoulacréationdupeuple, il affirmedonc—et réaffirme 
sanscesse— quec’est aucontrairel’Etat qui doit fonderlanation, mettrelepeuple 
enformeet créer lasociété. « Lepeuple, lanation, écrit-il, n’existent qu’entant 
qu’Etat, dansl’Etat et, dansunecertainemesure, grâceàl’Etat »(19). Cet Etat doit 
sefonder exclusivement sur desprincipessupérieurs, spirituelset métaphysiques. 
C’est seulement ainsi qu’il seraun« Etat vrai », un« Etat organique », nonpas 
transcendant par lui-même, mais fondé sur la transcendance de son principe. 
Cet « étatisme »est certainement cequ’il yadeplusfrappant danslapensée 
politique d’Evola. Sans doute est-il assorti d’un certain nombre de précisions 
destinées à dissiper tout malentendu. Evola prendainsi le soinde direque la 
« statolâtriedesmodernes », tellequ’onlatrouveparexemplechezHegel, n’arienà 
voir avecl’« Etat vrai »tel qu’il l’entend. Il souligneaussi quebiendesEtatsforts 
ayant existédansl’histoirenefurent quedescaricaturesdecelui qu’il appelledeses 
vœux. Il critique d’ailleurs avec vigueur le bonapartisme, qu’il qualifie de 
« despotismedémocratique », commeletotalitarisme, danslequel il voit une« école 
de servilité » et une « extension aggravante du collectivisme ». Le primat qu’il 
attribueàl’Etat n’enest pasmoinssignificatif, surtout lorsqu’onlerapporteàcequ’il 
dit dupeupleet delanation. Tandisquelanotiond’« Etat »apresquetoujourschez 
lui une connotation positive, celles de « peuple » ou de « nation » ont presque 
toujoursunevaleur négative. L’Etat représentel’élément « supérieur », tandisquele 
peupleet lanationnesont quedes éléments« inférieurs ». Qu’il soit demosou 
ethnos, plebsoupopulus, lepeuplen’est auxyeuxd’Evolaque« simplematière »à 
conformer par l’Etat et ledroit. Il envademêmedelanationet delapatrie. Des 
termes comme « peuple », « nation », « société », apparaissent même dans ses 
écritscommepratiquement interchangeables : touscorrespondent àladimension 
purement physique, « naturaliste », indifférenciée, fondamentalement passive, dela 
collectivité, àladimensiondela« massematérialisée »qui, par oppositionàla 
formequeseulepeut conférer l’Etat, restedel’ordredelamatièrebrute. Evolase 
situedecepoint devueàl’exact opposédesthéoriciens duVolksgeist, comme 
Herder : lepeuplenesaurait représenterpourlui unevaleurensoi, il nesaurait être 
ledépositaireprivilégiédel’« esprit »créateur d’unecollectivitédonnée. Evolaest 
tout aussi indifférent àlaquestionduliensocial, voireausocial lui-même, qu’il
englobevolontiersdansl’« économico-social », autredésignationchezlui dumonde 
del’horizontal oudurègnedelaquantité. « Tout cequi est social, écrit-il, selimite, 
danslameilleuredeshypothèses,àl’ordredesmoyens »(20). C’est pourquoi l’onne 
trouve pas chez lui de pensée sociologique, ni d’ailleurs de véritable pensée 
économique. 
Ceregardposésur lepeuplen’expliquepasseulement l’hostilitéd’Evolaenvers 
touteformededémocratieoudesocialisme, fût-il « national »(21). Il est également 
sous-jacent àsacritiquedunationalisme. Celle-ci reposeenfait sur deuxéléments 
distincts : d’unepart uneadhésionaumodèledel’Empire, contrelequel sesont bâtis 
lesroyaumesnationauxet lesnationalismesmodernes—Evolasouligneici avec 
bonheurquel’idéed’Empiren’arienàvoir aveclesimpérialismesmodernes, qui ne 
sont engénéral quedesnationalismesaggravés—, et d’autrepart, l’idéequela 
nation, commelapatrie, est d’essencefondamentalement « naturaliste »entant 
qu’elleressortit àlafoisaudomainedela« quantité »et aupur« sentiment ». Evola 
admet certesquelenationalismevautmieuxquelecosmopolitismepolitique, dansla 
mesureoùil représenteunniveaud’existenceplusdifférencié, et qu’il peut ainsi 
constituer le « prélude d’une renaissance », mais il n’en décrit pas moins le 
nationalismecommeunedoctrinesentimentaleet naturaliste, qui trouvesonprincipe 
dansleprimat ducollectif et, decefait, s’accordemal avecsaconceptiondel’Etat. 
Se « dissoudre »dans lanationvaut à peinemieux quese« dissoudre »dans 
l’humanité (22). 
Serefusantàfairedel’Etat l’expressiondelasociétéet réagissantcontreceuxqui 
voient dansl’Etat unesortedefamilleagrandie(oùlesouverainjouerait lerôledu 
pater familias), Evolaenexpliquel’origineàpartir dela« sociétéd’hommes ». Il 
rejoint ici HansBlüher, qui plaçait lui aussi les anciennes « Männerbünde »àla 
sourcedetoutevéritableautoritépolitique. Cettesociétéd’hommesest àconcevoir 
d’abordcommeuneassociationexclusivement masculine, ensuitecommelieude 
regroupement d’uneélite. Laformed’association« virile »par excellenceest pour 
Evolacelledel’Ordre. Lesexemples qu’il donnesont principalement l’Ordredes 
Templiers et celui des Chevaliers teutoniques. 
Lanotiond’Ordrepermet decomprendretout cequi séparel’élitismeprônépar 
Evola, élitisme essentiellement éthique, de l’élitisme libéral ou méritocratique. 
Appartient à l’élite, non le « meilleur » au sens darwinien du terme ou le plus 
performant ausensdePareto,maiscelui chezqui l’ethosdominesurlepathos, celui 
qui a« lesensd’unesupérioritévis-à-visdetout cequi n’est quesimpleappétit de 
“vivre” »(23), celui qui afait siens« leprinciped’êtresoi-même, unstyleactivement 
impersonnel, l’amour deladiscipline, unedispositionhéroïquefondamentale »(24). 
L’éliteest doncd’abordchezlui unearistocratie. Elleincarneune« racedel’esprit », 
untypehumainparticulier qu’Evoladéfinit comme« hommedifférencié », et dont il 
posel’avènement (oularenaissance) commeunpréalableindispensableàtoute 
actionsur lemonde : « Cequ’il faut favoriser, c’est [...] unerévolutionsilencieuse, 
procédantenprofondeur, afinquesoientcrééesd’abordàl’intérieuret dansl’individu 
lesprémissesdel’ordrequi devraensuites’affirmer aussi àl’extérieur, supplantant
enunéclair, aubonmoment, lesformeset lesforcesd’unmondedesubversion » 
(25). 
Sa propositionfinale, toujours lamême, est donc d’enrevenir àl’Idéeet de 
susciter lanaissanced’unOrdre, auseinduquel seretrouveraient des hommes 
supérieursrestésfidèlesàcetteIdée : « Nepascomprendreceréalismedel’Idée 
signifierestersurunplanqui est, aufond, infrapolitique :leplandunaturalismeet du 
sentimentalisme, pour nepasdirecarrément delarhétoriquepatriotarde[...] Idée, 
Ordre, élite, Etat, hommesdel’Ordre—qu’encestermessoit maintenuelaligne, 
tant quecelaserapossible »(26) ! CetteconsigneachezEvolavaleur desolution. 
Qu’uncertaintypeéthiquesurgisseouresurgisse, et lesproblèmes politiqueset 
sociaux seront, sinon résolus, du moins « simplifiés » : « Lorsque cet esprit 
s’affirmera, denombreux problèmes, ycomprisd’ordreéconomiqueet social, se 
simplifieront »(27). Lapositionadoptéepar Evolafaceauxproblèmespolitiquesest 
doncendéfinitivecelled’unélitismeéthiqueàfort contenu« viril », déduit d’une 
conception métaphysique de l’histoire. 
La polarité masculin-féminin 
Aupremier abord, JuliusEvolapeut apparaîtreàl’historiendesidées comme 
l’incarnationtypique,et mêmeextrême,duthéoricienantidémocratique,théoriciende 
l’élitismearistocratiqueet desvaleursd’« AncienRégime », adversaireimplacable 
desidéesde1789, detout cequi leurapermisd’apparaîtreet detout cequi enest 
issu. C’est d’ailleursbienainsi qu’il asouvent étéconsidéré. MaisnevoirEvolaque 
decettefaçon, c’est perdredevuecequi fait sonoriginalitéet lerendenfinde 
comptesi malaisément classabledansl’histoiredelapenséepolitique. Plutôt quede 
résumer oudeparaphraser sesidées, ainsi qu’onlefait souvent, nousvoudrions 
montrer quesonapprochedelapolitiqueouvredes interrogations et posedes 
problèmesquel’onvoudrait cernerici, sansnécessairement yrépondreouprétendre 
les résoudre. 
Onadéjàévoquélafaçondont Evolaopposel’Etat et lepeuple. Cetteopposition 
n’est pasensoi originale. Cequi est enrevanchetrèssingulier chezEvola, c’est le 
parallèlequ’il fait constamment entrecetteoppositionet lapolaritémasculin-féminin, 
surlabasedel’anciennesymboliqueanalogiquedelaformeet delamatière. « Pour 
lesAnciens, écrit-il, la“forme”adésignél’esprit,la“matière”lanature, lapremièrese 
rattachant à l’élément paternel et viril, lumineux et olympien [...] la seconde à 
l’élément féminin, maternel, purement vital »(28). L’idéequ’il endéduit est que 
« l’Etat setrouvesouslesignemasculin, la“société” et, par extension, lepeuple, le 
demos, souslesigneféminin »(29). Cetteidéeétait déjàprésentedansRévolte 
contrelemondemoderne : « L’Etat est aupeuplecequeleprincipeolympienet 
ouranienest auprincipechtonienet “infernal” ; l’Etat est commel’“idée”et la“forme” 
(nous)parrapport àla“matière”et àla“nature”(hylè), il setient doncdanslerapport 
d’unprincipelumineux, masculin, différenciateur, individualisant et fécondateur face 
àunesubstanceféminine, instable, hétérogèneet nocturne. Cesont làdeuxpôles
entrelesquelsil existeunetensionintime. Danslemondetraditionnel, celle-ci se 
résoudpar unetransfigurationet unestructurationd’enhaut »(30). Danslemême 
livre, Evolaaffirmait déjàque« l’attachement plébéienàlaPatrie, qui s’affirmaavec 
laRévolutionfrançaiseet qui fut développépar lesidéologiesnationalistesentant 
quemystiquedelaraceet, précisément,delaMèrePatriesacréeet toute-puissante, 
est lareviviscenced’uneformedetotémismeféminin »(31). DansLeshommesau 
milieudesruines, il ajoute : « Lesconceptsdenation, depatrieet depeuple[...] 
appartiennent par essenceauplan“naturaliste” et biologique, nonauplanpolitique, 
et correspondent àladimension“maternelle”et physiqued’unecollectivitédonnée » 
(32). Et encore : « L’image de la Patrie en tant que Mère, en tant que Terre dont nous 
sommestouslesfilset par rapport àlaquellenoussommestouxégauxet frères, 
correspondclairement àcet ordrephysique, fémininet maternel, dont, commenous 
l’avonsdit, seséparent les“hommes” pour créer l’ordreviril et lumineuxdel’Etat » 
(33). 
Onpourrait multiplierlescitations. Noussommeslàenprésenced’uneconstante 
majeuredelapenséed’Evola, enmêmetempsqued’untrait qui ledistingueencore 
trèsnettement par rapport auxautrespenseursdelaTradition. Jean-Paul Lippi va 
mêmejusqu’àécrire, àjustetitreànotreavis, quelavisiondumondeévolienne« se 
déploietout entière, ycomprisdanssadimensionproprement politique, àpartirdela 
bipolarité masculin-féminin » (34), et que « l’interprétation métaphysique du 
phénomène politique à laquelle se livre Evola ne prend sens que d’être 
surdéterminéepar l’importancequerevêt chezlui labipolaritémasculin-féminin » 
(35). 
Disonspour fairebref quechezEvola, la« virilité »est constamment associéeà 
des notions telles quela forme, la surnature, l’esprit, la raison, l’abstraction, la 
luminosité« solaire », laverticalité, l’absolu—la« féminité »évoquant aucontraire 
lamatière, lanature, l’âme, lesentiment, leconcret, lesténèbres« chtoniennes »ou 
« lunaires », l’horizontalité, lerelatif, etc. Laquestionqui surgit alorsest desavoir 
comment doivent se poser ous’articuler les rapports entre ces deux séries de 
termes. 
Acettequestion, Evolaapporteuneréponseambiguë. Lorsqu’il parledel’homme 
et delafemme, il insisteàmaintesreprisessurlacomplémentaritédessexeset sur 
lefait que, dufait deleurdifférencemême, laquestiondeleursupérioritéoudeleur 
inférioritérespectiveest dépourvuedesens. Cependant il affirmeaussi quec’est 
bienl’élément masculin, posécommeformeautonome, qui doit imposer samarque, 
son empreinte, à l’élément féminin, posé comme matière hétéronome. La 
complémentaritévadoncdepair aveclasubordination. C’est unecomplémentarité 
hiérarchisée, fondée sur la prééminence du premier terme (masculin, donc 
anagogique) sur le second (féminin, donc catagogique). C’est d’autre part une 
complémentarité non dialectique, et même ouvertement anti-dialectique, 
puisqu’Evolaaffirmeque« dupoint devuedel’éthiquetraditionnelle, est mal et 
antivaleur cequi est masculinchezlafemmeet cequi est fémininchezl’homme » 
(36).
MaisEvolanesebornepasàposerlapolaritémasculin-fémininàl’intérieurdela 
société. Il enfait aussi uneclef desaconceptiondel’histoireet desavisiondes 
rapportsentrelescultureset lescivilisations. C’est ainsi qu’il opposelescivilisations 
issuesdela« LumièreduNord »—la« Traditionprimordiale »est pour lui d’origine 
« hyperboréenne ou nordico-occidentale » —, porteuses d’un ethos viril, 
« lumineux », et d’unespiritualitéhéroïqueet guerrière, auxculturesduSud, qui 
correspondent àsesyeuxau« mondechtonien »delaMèreet delaFemme. Orici, 
il n’yaplusdutout complémentarité, maisoppositionirréductible. Evolaledit avecla 
plusgrandenetteté : « Deuxattitudessont possiblesfaceàlaréalitésurnaturelle. 
L’uneest solaire, virile, affirmative, correspondant àl’idéal delaroyautéet dela 
chevaleriesacrée. L’autreest lunaire, féminine, religieuse, passive, correspondant à 
l’idéal sacerdotal. Si lasecondeappartient principalement auxculturessémitiqueset 
méridionales, la noblesse de race nordique et indo-européenne a toujours été 
solaire »(37). CequeRomeeut deplusromain, dit-il encore, s’est formé« àtravers 
une lutte incessante du principe viril et solaire de l’Imperiumcontre un obscur 
substrat d’élémentsethniques, religieuxet mêmemystiques[...] oùlecultetellurique 
et lunairedesgrandesDéessesMèresdelanaturejouait unrôletrèsimportant » 
(38). Sur le plan mythologique, les dieux célestes, diurnes, virils, olympiens, 
s’opposent auxdivinitéschtoniennes, nocturnes,terrestres, fémininesetmaternelles, 
« chèressurtout auxcouchesplébéiennes »(39). Sur leplansocial, lepatriarcat 
indo-européen est censé contraster pareillement avec le « matriarcat oriental » (40). 
Cette« lutteincessante »neselimitepasselonEvolaàlaseuleAntiquité. Elle 
constitueaucontraireàsesyeuxl’undesélémentscentrauxdel’histoire, dansla 
mesureoùleprocessusdedécadencequ’il stigmatiserésideprécisément dansla 
montée progressive des valeurs propres au monde chtonien matriarcal et 
gynécocratique, aumondedes« racesobscures »et « lunaires », et dansledéclin 
corrélatif desvaleurspropresàl’esprit viril « olympien »et « hyperboréen », queles 
premièresmenacent constamment de« dissoudre »(41). Lescritiquesqu’il adresse 
àsesadversairessont decepoint devuesanséquivoque. Auchristianisme, qu’il 
décrit soussaformeprimitivecommeune« religiontypiquedukali-yuga »(42), il 
reproched’avoir contribué, entant quereligiondel’« amour », porteusedel’idée 
« lunaire »d’égalitémoraledetousleshommes, àla« dévirilisationspirituelle »de 
l’Occident. Il accuseles guelfes, adversairesdesgibelinslorsdelaquerelledes 
investitures, d’avoir véhiculé la « vieille conception gynécocratique » d’une 
« dominationspirituelleduprincipematernel surleprincipemasculin »(43). Quandil 
dénonce la démocratie et le socialisme, c’est pour dire qu’avec eux aussi 
« s’accomplit latranslationdufémininaumasculin »(44), parcequeledemos, étant 
« fémininpar nature », n’aurajamais« devolontépropreet claire »(45) : la« loi du 
nombre », caractéristiquedu« règnedelamasse », est doncelleaussi d’inspiration 
« gynécocratique ». Demême, quandil s’enprendàl’art moderne, c’est pour y 
constater lamanifestationde« tendances intimistes, expressions caractéristiques 
d’une “spiritualité” féminine » (46). Ailleurs, il se réfère à Otto Weininger pour 
souligner lesaffinitésdel’esprit fémininet del’esprit juif. Il dénoncemêmedansle 
racisme biologique une doctrine caractéristique du règne dela quantité, dont il 
soulignelecaractère« naturaliste », et doncféminin. Inversement, s’il fait l’élogede 
l’autarcieéconomique, c’est quecelle-ci lui apparaît commeunetranspositionde
l’idéemasculined’autonomiedesoi, cequi suffit àlui conférerunevaleur« éthique » 
(47). 
Il n’est doncpas douteux que, pour Evola, letrait leplus évident delacrise 
existentiellemodernerésidedansl’effacement dela« virilitéspirituelle »—titredu 
chapitre7deRévoltecontrelemondemoderne—sousl’effet, d’aborddelamontée 
des valeurs féminines, puis de la tendanceà l’indifférenciationdes sexes. « La 
diffusionpandémiquedel’intérêt pour lesexeet lafemme, écrit-il, caractérisetoute 
époquecrépusculaire[...] Lapandémiedusexeest l’undessignesducaractère 
régressif del’époqueactuelle[dont la] contrepartienaturelleest lagynécocratie, la 
prédominancetacitedetoutcequi, directementouindirectement, est conditionnépar 
l’élément féminin »(48). « Ainsi placéesouslesignedel’involution, remarqueJean- 
Paul Lippi, l’histoire [...] apparaît comme un processus de féminisation » (49) ; 
l’histoireest « dominationsanscesseaccentuéedupôlefémininsurlepôlemasculin 
del’être »(50). Lamodernités’assimiledèslorsàun« retourdumatriarcat », àune 
« matière »émancipéedetoute« forme ». Lamorphogenèsedelamodernitéest 
avant tout dévirilisante et potentiellement castratrice. 
Onest évidemment frappépar cettefaçondont, chezJuliusEvola, leprincipe 
fémininoulesvaleursfémininessont toujoursreprésentéscommeunemenacepour 
la« puissancemasculine », commeunrisquede« destitutiondelavirilité »(51). On 
l’est d’autant plusqu’Evola, danslamesuremêmeoùil seveut àlafoissouverainet 
guerrier, attacheàlanotiondepuissance, aveclaquellelalecturedeNietzschel’a 
familiarisédanssajeunesse, uneimportancedécisive. Entant quecaractéristiquela 
plusévidentedelavirilité, affirmait-il danslesannéesvingt, lapuissancetired’elle- 
même sa propre justification. Elle est le « principe de l’absolu », l’« arbitraire 
causalitéinconditionnée », l’« agir qui sejustifiedelui-même ». Par lasuite, allant 
unefoisdeplusàcontre-courant desautrespenseursdu« traditionalismeintégral », 
Evolan’a jamais hésité àdéfinir la Tradition comme étant avant tout « force », 
« énergie », « puissance ». Son deuxième livre, paru en 1926 et consacré au 
tantrisme, s’intitulait L’hommecommepuissance(Leyogadelapuissancedans 
l’éditiontransforméede1949). Letantrismeest eneffet d’abordune« visiondu 
mondecommepuissance »(52), unedoctrinequi conçoit lecorpscommeunvaste 
réservoir depuissance(Çakti). Cettethématiquedela« puissance »est detoute 
évidenceliéechezEvolaàcelledela« virilitéspirituelle ». Lecontrastequi apparaît 
ici entrelaTraditioncommepuissanceet lamodernitécommecastrationpotentielle, 
mise en danger de la virilité, n’en est que plus parlant. 
Les remarques qui précèdent ne permettent sans doute pas de dissiper 
l’ambiguïtéévoquéeplushaut àproposdesrapportsentrel’Etat « masculin »et le 
peuple« féminin »danslapenséeévolienne, maisellespeuvent aider àlacerner. 
Cetteambiguïtétient aufait quelemodèlebipolaireauquel seréfèreEvolaest utilisé 
tantôt pour fonder une complémentarité hiérarchisante, tantôt pour illustrer une 
oppositionirréductibleouuneincompatibilitéradicale. Dansbiendescas, observe 
Jean-Paul Lippi, Evolaparaît « privilégier lahiérarchisationdespôlesmasculinet 
fémininpar rapport àleurcomplémentarité, cequi leconduit pratiquement àexclure
lesecond »(53). Maislahiérarchisationsupposeencoreuneunité, elleimpliqueun 
englobement àl’intérieur d’unemêmestructure. Or, leplussouvent, il nefait pasde 
doutequecen’est paslacomplémentariténi l’englobement hiérarchisant qu’Evola 
recommandevis-à-visdesvaleursféminines, maisbienplutôtleurmiseàl’écart, leur 
relégationàdistanceet unelutteactivecontretout cequ’ellesreprésentent. Les 
valeurs féminines sont alors définies comme des valeurs ennemies, avec lesquelles il 
n’est pasquestiondumoindrecompromis. Quedoit-il enêtrealorsàl’intérieur dela 
société ? 
Il semblebienenfait que, pour Evola, leshommesnepuissent apparteniràl’élite 
—surtout quandcelle-ci serassembleauseind’unOrdre—qu’enseséparant des 
femmes. Il déclareeneffet explicitement queleshommesnepeuvent créer l’« ordre 
viril et lumineuxdel’Etat »qu’enseséparant del’« ordreféminin »(54). Il prônela 
renaissanced’un« mondeclair, viril, articulé, fait d’hommeset dechefsd’hommes » 
(55). Par ailleurs, il necachepassafaveur pour lecélibat, voirepour lerefusde 
l’enfant, enaffirmant qu’il est bonpour leshommeslibreset créateursd’êtresine 
impedimentis, sans rien qui les attache ou les limite : « L’idéal d’une “société 
d’hommes” nesaurait êtrecelui, paroissial et petit-bourgeois, qui consisteàavoir 
“unemaisonet desenfants” ». Il seflattelui-mêmed’avoir toujoursvécu« étranger 
auxroutinesprofessionnelles, sentimentaleset familiales »(56). Commepour saint 
Paul, lemariagen’est pourlui qu’unpis-aller. Maissamiseengardevatrèsau-delà 
d’unméprisjustifiépour la« petiteviebourgeoise ». Il yadanssesadmonestations 
quelquechosequi, nonseulement fait delafemmeunemenaceintrinsèquepour la 
« virilité », maistendàdévaluer tout cequi est del’ordredusimplement vivant, du 
simplement naturel, dusimplement charnel. Danscettecritiquedu« naturalisme »et 
dela« chair », commedanssadénonciationdel’« absurditédelaprocréation », il 
n’est pasexcessif dedéceler chezlui unetendance« gnostique », qu’onpourrait 
aussi bien qualifier de marcionite ou de cathare. 
L’individualisme évolien 
Uneautreinterrogationquesoulèvelapenséepolitiqued’Evolaatrait aurôleque 
jouechezlui lanotiond’individu. Si l’ons’entient àsacritiquedulibéralismeentant 
quedoctrinefondéesur l’individualismeet sur uneconception« informe »dela 
liberté, critiqued’untypetout àfait classiquedanslesmilieuxantilibéraux, onest 
évidemment amenéàconclurequ’unetellenotionn’achezlui qu’unerésonance 
négative. Toutefois, si l’onprendencomptesonévolutionpersonnelleet si l’onmet 
enperspectivetout cequ’il apuécriresurlesujet, ons’aperçoit assezvitequecette 
problématique est chez lui plus complexe qu’il n’y paraît. 
Danslesannéesvingt, lejeuneJuliusEvolaaeneffet commencépar professer 
un« individualismeabsolu ». Il amêmerédigéàcetteépoqueunouvrageimportant, 
Teoriaefenomenologiadell’Individuoassoluto, qui donnafinalement naissanceà 
deux livres distincts (57) dont il n’hésitait pas à dire alors qu’ils représentaient 
l’« exposé systématique et définitif » de sa « doctrine » (58). Cet individualisme
professépar Evoladurant sapériodedadaïsteseressent surtout del’influencede 
l’idéalismeallemand, delapenséedeNietzscheet del’anarchismeindividualistede 
MaxStirner. Evolasefixealorspour but d’énoncer unethéoriephilosophiquequi 
s’efforcerait deporter l’idéalismejusquedanssesplusextrêmesconséquencesen 
exrimant l’« exigenced’auto-affirmationabsoluedel’individu ». Par lasuite, il dira 
d’ailleursavoir tirédelalecturedeNietzscheavant tout l’idéed’unerévoltefondée 
sur « l’affirmationdesprincipesd’unemoralearistocratiqueet desvaleursdel’être 
qui selibèredetout lienet est àlui-mêmesapropreloi »(59)—formulationqui n’est 
pasdénuéed’ambiguïté, puisquedansladoctrinelibéraleaussi l’individu, entant 
qu’il est poséd’embléecommeautosuffisant, est « àlui-mêmesapropreloi ». De 
fait, l’« individuabsolu »est celui qui seposedepar saproprevolontécommele 
principe central et l’arbitre de toute détermination. Sa volonté, étant dégagée de toute 
contrainte, de toute limitation, est libre au double sens d’arbitraire et 
d’inconditionnée ; elleest synonymedepuissancepure. L’individuabsoluvoit donc 
l’existencecommeprocès continud’affirmationdesoi, celle-ci étant dégagéede 
touteespècedecontingenceet dedétermination. Il yadanscettevisionuncertain 
caractèresolipsiste : l’individuuniqueet absoluest enfindecompteàsespropres 
yeux tout ce qui existe. 
Laquestionqu’il faut seposer est desavoir si le« typed’homme »prônépar 
Evoladanssesécritspolitiquesest trèséloignédecet individuabsoluverslequel il 
tendait danslesannéesvingt,ous’il n’existepascertainessimilitudesentrel’individu 
absolu, centredepuissanceet devolonté, chezqui lavolontéd’êtreet lavolontéde 
dominer nefont qu’un, et l’hommeabsolument souveraintel queleredéfiniraEvola 
dans le cadre de sa vision traditionaliste. 
C’est au tout début des années trente qu’Evola semble avoir abandonné ou 
modifiéses présupposés individualistes. Apartir decettedate, il reprendàson 
comptelacritiqueopposant classiquement l’individuet lapersonne, et dénonceun 
individualismedanslequel il necesseraplusdevoir l’« essencedulibéralisme ». 
L’individualisme, dèslors, nefondeplusl’attitudearistocratique, maislacontredit 
directement. Il n’est plussynonymedesupérioritéindividuelle, maisd’universalisme 
égalitaireet dedissolutionsociale. Cependant, alors quelacritiqueclassiquede 
l’individualisme lui oppose régulièrement des entités collectives (peuple, nation, 
communautés, etc.) dans une perspective résolument holiste, en accusant 
l’individualismelibéral dedétruirelecaractèreéminemment organiquedecesentités, 
Evola emprunte une voie totalement différente. Il y a là bien entendu, comme 
toujourschezlui, unegrandecohérence : danslamesureoùtoutecommunauté, tout 
groupe collectif, relève à ses yeux d’un niveau « naturaliste » inférieur, d’une 
dimensionféminined’« enbas », il nesaurait êtrequestionpour lui deplacer le 
peuple, lasociétéoulanationau-dessusdel’individu. C’est doncaunomd’une 
autre conception de l’individu, celle de l’individu « différencié », qu’Evola va 
combattre l’individualisme libéral. Al’individualisme qui pense l’individu comme 
atomeindifférencié, commeélément « atomique »,Evolaopposeuneconceptionqui, 
par différenciationssuccessives, tendversl’idéal dela« personneabsolue » : « Etre 
simplement “homme”est unmoinspar rapport aufait d’êtrehommedansunenation 
donnéeet unesociétédonnée, maisceci est àsontour unmoinspar rapport aufait
d’êtreune“personne”, qualitéimpliquant déjàlepassageàunplanqui est plusque 
simplement “naturaliste”et“social”. Asontour, lapersonneconstitueungenrequi se 
différencie lui-même en degrés, fonctions et dignités [...] selon une structure 
pyramidale, ausommet delaquelledevraient apparaîtredestypesplusoumoins 
prochesdelapersonneabsolue—c’est-à-direcellequi présenteleplushaut degré 
deréalisationet constitue, àcetitre, lafinet lecentredegraviténaturel detout 
l’ensemble » (60). 
L’usagedumot « personne », qu’Evolaopposeàl’« individu », nedoit pasici faire 
illusion. Alorsquelacritiqueantilibéraleclassiquedonnedecetermeunedéfinition 
mettant immédiatement l’accent sursadimensionsociale—lapersonneentant que 
sujet concret, inscrit et saisi dansuncontextedonné, par oppositionàl’individu 
commesujet abstrait coupédesesappartenances—, Evolalui donneunetout autre 
définition. Lapersonne,chezlui,nesedéfinitnullement parsesappartenances, mais 
par lefait qu’elleest « ouvertevers lehaut », c’est-à-direqu’elleadhèreàdes 
principes supérieurs. Etre une personne, dans cette acception, ce n’est pas 
appartenir àunesociétéouàunecommunautédetypeorganique, maisfairepartie 
d’une élite. C’est là un point essentiel, trop souvent perdu de vue. 
Si l’on reprend l’opposition classique tracée par Louis Dumont entre 
l’individualismeet leholisme(61), Evolanesesituedonc nullement ducôtédu 
holisme. Touteslesdoctrinesholistessoutiennent quel’hommeest indissociablede 
sesappartenances, quel’onnesait dequel hommeonparlequelorsqu’onsait aussi 
àquellecollectivitéil appartient. Ellesajoutent quel’humanitén’est pascomposée 
d’individus, mais d’ensembles d’individus : peuples, communautés, cultures, etc. 
Evolaaffirmeaucontrairequelapersonneachevéeest enquelquesorteaffranchie 
detoutedimensionsociale, précisément parcequ’elles’est dégagéedetout cequi 
est « inférieur ». Or, lelibéralismeest aussi ladoctrineselonlaquellel’hommen’est 
pasimmédiatement ni fondamentalement social, cequi fondesaconceptiondela 
libertécommedroit individuel àdisposerlibrement desoi. C’est pourquoi EnricoFerri 
apuaffirmerqu’àl’individualismeégalitaire, Evolaseborneàopposerune« version 
aristocratique de l’individualisme », en ajoutant que « les principales thèses 
fondatricesdel’individualismesont enfait également partagéespar letraditionaliste 
Evola, lapremièreétant quelanaturehumaineest individuelleet quel’humaniténe 
secomposepasd’ensembles sociaux, mais d’individus »(62). Lepoint commun 
entrelelibéralismeet lapenséeévolienneserait ici quelasociéténeprimepas— 
quecesoit sur lapersonneousur l’individu. Unautrepoint commun, découlant du 
précédent, est une même hostilité viscéraleenvers l’idéede « justicesociale », 
mêmesi celle-ci s’exprimebienentenduàpartir deprémissesdifférentes. « Toute 
thèse“sociale”,écrit Evola, estunedéviation,solidairedelatendanceaunivellement 
régressif [...] si bienquel’individualismeet l’anarchisme, neserait-cequ’àtitrede 
réactioncontrecettetendance, ontincontestablement uneraisond’être, uncaractère 
moins dégradant » (63). Cette dernière remarque est significative. 
QuandEvoladénoncel’universalismepolitiqueoulecosmopolitisme, cen’est 
doncpastant parcequecet universalismefait bonmarchédesidentitéscollectives
queparcequelanotiond’« humanité »représenteàsesyeuxcequ’il yadeplus 
éloignédel’individutel qu’il leconçoit.Lepeupleoulanation, onl’adit, valent mieux 
pour lui quel’humanité, mais seulement dans lamesureoùilsreprésentent des 
niveaux plus différenciés. Ils sesituent enrevanche bien en dessous de l’élite 
aristocratique, qui est porteusedevaleurssupérieuresàtout intérêt delacollectivité, 
et dont lerôleest d’accélérer « leprocessusqui mènedugénéral aucollectif et du 
collectif àl’individuel [soulignépar nous], directionqui est celledetout progrès 
véritable »(64). Lapersonnedifférenciée, end’autrestermes, primesur touteentité 
collective ou sociale, quelle qu’elle soit. 
ChristopheBoutin, auteurd’uneimportantebiographieconsacréeàJuliusEvola, a 
crupouvoirdécelerchezcedernierune« natureprofondedeguerrierindividualiste » 
(65). S’il est individualiste, c’est enfait àlafaçondel’individuqui s’éprouvelui- 
même, àtort ouàraison, commeabsolument supérieuràlamasse. L’individualisme 
est doncchezlui indissociabledel’élitisme, aveccequecelasupposed’horreur du 
conformisme, de refus d’être « comme les autres » —attitude évidemment 
susceptibledemener dansdesdirectionsbiendifférentes. Cet élitismeconstituele 
dénominateurcommundetouteslespériodesdesonexistence. Toutesaviedurant, 
Evola a voulu se distinguer d’une « plèbe » vis-à-vis de laquelle il n’a jamais 
dissimulésonmépris. Il s’enest distinguécommedandy, commedadaïste, comme 
tenant del’individuabsolu, puiscommereprésentant d’uneécoletraditionalistequi a 
fourni à son élitisme de puissantes justifications doctrinales. Son goût pour 
l’ésotérisme, la magie, l’alchimie ou l’hermétisme, consonne lui-même fortement 
aveccesentiment d’apparteniràunpetit nombre(l’« Ordre »)et d’êtrelui-mêmeune 
« personneabsolue » : l’ésotérismes’adresse par définition àdes « initiés ». On 
pourrait diredecepoint devueque, chezEvola, lavolonté(et lesentiment) dene 
pas être« commeles autres »aprécédé, et nonpas suivi, l’énoncédecequi 
justifiait cetteprisededistanceet dehauteur, c’est-à-direlaclaireconsciencedes 
raisonsd’unetelleattitude. Sonoppositionradicaleaumondeenvironnant n’acessé 
d’osciller entrelerefuset lanégation, quecesoit danssajeunesseaunomdela 
libertéinconditionnéedel’individuabsolu(lemondeextérieur commeinexistant ou 
purelimitationdumoi)ou, danssapériodedematurité, aunomd’unemétaphysique 
de l’histoire interprétant toute l’histoire advenue comme déclin et dévaluant 
absolument la période présente en tant que fin de cycle. 
Peut-êtreest-ced’ailleursàcettetendanceausolipsismequ’il faut rattacher ce 
que dit Evola à propos de l’« impersonnalité active ». Par cette formule, Evola 
désignel’hommequi adépassésonmoi proprement humainet qui s’élèveauniveau 
métaphysiqueenagissant conformément auxseulsprincipes. Maisil resteàsavoir 
comment l’« impersonnalité active » peut être encore le fait d’une « personne 
différenciée ». Les chosess’éclairent si l’onadmet quel’« impersonnalitéactive » 
caractériseavant tout le« roi dumonde », qui gouvernelemondeàlafaçondont 
l’étoile polaire « gouverne » le ciel : par une immobilité d’où paraît dériver tout 
mouvement. Evoladit quelebut final del’existencedel’éliteest defaireapparaître 
« lepremier desaristocrates »(66), leMonarque, enqui semanifeste« quelque 
chosedesupra-personnel et denonhumain »(67). Untel Monarqueest àcertains 
égardsàlafoislecentredumondeet lemondeàlui tout seul —souveraineté
absolue, liberté absolue, puissance absolue. 
Etat organique ou société organique ? 
Julius Evola qualifie fréquemment l’Etat qu’il appelle de ses vœux d’« Etat 
organique ». Il affirme ainsi que « tout véritable Etat a toujours eu un certain 
caractère d’organicité » (68). Il déclare que l’« authentique structure impériale » 
pourrait sedéfinir commeun« organismecomposéd’organismes »(69). Il parle 
également d’une « analogie naturelle existant entre l’être individuel et ce grand 
organismequ’est l’Etat »(70). Il sembleainsi adopterlepoint devuedesthéoriciens 
politiques de l’organicisme. La notion même d’« Etat organique » a néanmoins 
quelquechosedeproblématique. JuliusEvolaest eneffet l’adversairedetouteforme 
de« naturalisme ». Il n’aqueméfiancepour tout cequi est del’ordredubiologique. 
La question est donc desavoir comment cet antinaturalisme rigoureux peut se 
concilier avec son « organicisme ». 
Quelaqualitéd’« organique »soit attribuéepar Evolaàl’Etat est déjàrévélateur. 
Les théoriciens politiques de l’organicisme —à la possible exception d’Othmar 
Spann—neparlent eneffet pratiquement jamaisd’« Etat organique ». Ilsparlent 
plutôt desociétéorganique, decultureorganique, decommunautésorganiques, etc. 
Et lemodèleauquel ilsseréfèrent est incontestablement unmodèleempruntéaux 
sciencesdelavie : unesociétéenbonnesantéest unesociétéoùil ya, dansles 
rapportssociaux, autant desouplessequ’il enexisteentrelesorganesd’unêtre 
vivant. On comprend bien, évidemment, que si Evola préfère parler d’« Etat 
organique », c’est que pour lui l’Etat est incommensurablement supérieur à la 
société. Mais un Etat peut-il être lui-même organique ? Pour les théoriciens 
classiquesdel’organicisme, laréponseest généralement négative : seulelasociété 
peut êtreorganique, précisément parcequ’unorganismesedéfinit commeuntout et 
qu’il nesaurait doncseramenerous’identifieràl’unequelconquedesesparties, fût- 
ellelapluséminente. Unesociétéorganiquepeut bienentenduavoirdesinstitutions 
fonctionnant detellefaçonqu’ellesenmaintiennent lecaractèreorganique, maisces 
institutions nesauraient elles-mêmes être qualifiées d’organiques : unEtat n’est 
jamaisunorganismeàlui tout seul. Danslaperspectiveorganicisteclassique, il est 
mêmeleplussouvent cequi menaceleplusl’organicitédelasociété. Evolaécrit 
qu’« unEtat est organiquelorsqu’il auncentreet quececentreest uneidéequi 
modèleefficacement, par saproprevertu, sesdiversesparties »(71). Aucontraire, 
pour l’organicismeclassique, unesociétéad’autant moinsbesoind’un« centre » 
qu’elleest précisément organique, car cequi définit l’organicitéducorpssocial, ce 
n’est pas sa dépendance par rapport à un centre (la « tête »), mais bien la 
complémentarité naturelle de toutes ses parties. 
L’« organicisme »d’Evolaest donctrèsdifférent del’organicismeclassique. Ce 
dernier, qui a le plus souvent partie liée avec les doctrines holistes, tend 
systématiquement à dévaloriser l’Etat et les institutions étatiques, considérées 
commeintrinsèquement « mécanistes », et àdonnerlerôleprincipal auxcollectivités
debaseet aupeuple. L’organicité, chezlesthéoriciensdel’organicisme, est toujours 
associé à ce qui est « en bas » et à ce qui est « spontané ». Leur critique, en général, 
consiste à opposer à une conception mécanique, rationalisée, abstraite, voire 
excessivement « apollinienne »del’existencesociale, lesprérogativesduvivant, du 
sensible, du charnel, manifestées dans l’esprit dionysiaque et dans l’« âme du 
peuple ». Or, c’est précisément ladémarcheinversequ’adopteEvola, puisquepour 
lui l’âme, lesensible, lepeuple, lecollectif, etc. renvoient systématiquement aux 
dimensions les plus « inférieures » de l’existence. Evola dit encore que « l’idée 
organiqueapour contrepartiecelled’uneformeformatriced’enhaut »(72). C’est 
précisément cequerécusent lesthéoriciensdel’organicismeclassique : pour eux, 
l’organicitéest unedonnéedefait, présenteaudépart ; ellenesaurait résulterd’une 
impulsion d’« en haut », celle-ci ne pouvant au contraire que l’affaiblir. 
Danslamesureoùil impliqueunedéconnectionradicaledel’organiqueet du 
biologique, l’exacteportéed’un« organicismed’enhaut »restedoncàétablir. Peut- 
onparlerd’« organicisme »dansunesociétéqui, loind’êtreunefin, est seulement le 
moyendefaireapparaîtreuneélitetendant elle-mêmeàla« personneabsolue » ? 
Un« Etat vrai »qui seveut affranchi detout conditionnement naturalistepeut-il être 
véritablement « organique » ? L’organicité, enfin, peut-elle être le résultat de 
l’autorité, delapuissanceet delavolonté ?Sur cepoint, l’expériencehistorique 
incitepourlemoinsàlaprudence. Aucoursdel’histoire, eneffet, chaquefoisqu’un 
Etat s’est affirmétitulaired’unpouvoirsouverainabsolu, l’organicitédusocial n’apas 
augmenté, maisdécru. LecasdelaFranceest àcet égardfrappant. Evolaatrès 
justement notéque, dans savolontédes’affranchir del’autoritédupapeet de 
l’empereur,lepouvoirroyal s’est enFrancecoupédetoutprincipespirituel supérieur. 
Maisil n’enest pasmoinsvrai quec’est aussi laFrancequi constituelemodèlele 
plusachevéd’unecréationdelanationparl’Etat. Or, c’est aussi lepaysoùl’autorité 
souverainedel’Etat, définiedepuisJeanBodincommeindivisibleet inaliénable, ale 
plusappauvri l’organicitésocialeet détruit lesautonomieslocales, tandisqueles 
libertéslocalesont toujoursétémieuxpréservéeslàoùc’est aucontrairelepeuple 
ou la nation qui ont créé l’Etat. Le contre-modèlede l’Empire, auquel Evola a 
consacréquelques-unesdesesmeilleurespages, est tout aussi parlant. L’empire 
romain-germaniqueaincontestablement mieux respectél’organicitédelasociété 
quel’Etat-nation. Maisil l’amieuxrespectéedanslamesureoùsonpouvoir était, 
non pas absolu et inconditionné, mais au contraire relativement faible, où la 
souveraineté y était partagée ou répartie, et où le pouvoir se souciait moins 
d’imposer sa« forme »auxdifférentescollectivitéslocalesquederespecter leplus 
possibleleur autonomie. Leprincipemêmedetouteconstructionimpérialeest en 
effet leprincipedesubsidiarité. Onnesaurait oublier queceprincipeimpliquede 
laisser àlabaselemaximumdepouvoir possibleet denefaireremonter versle 
« haut » que la part d’autorité et de décision qui ne peut s’y exercer. 
Entre la monarchie et la Révolution conservatrice 
Julius Evola s’est toujours considéré comme un représentant de la « vraie 
Droite », qu’il adéfiniecommela« gardiennedel’idéedel’Etat vrai »et commela
famille de pensée qui a su faire siennes les « valeurs politiques hiérarchiques, 
qualitatives, aristocratiqueset traditionnelles »(73). Il faut entendrepar làuneDroite 
qui, nonseulement rejettelaRévolutionde1789et sessuites, maisqui s’efforcede 
maintenir vivantsl’ensembledesprincipes, desattitudesmentaleset desvaleurs 
spirituellescaractéristiquesd’uneconceptionmétaphysiquedel’existencedérivéede 
la« Traditionprimordiale ». Cettedéfinitionrestetoutefoisambiguë, nonseulement 
enraisondelapolysémiedumot « Droite »—il yaeudansl’histoirebeaucoupde 
droites différentes, dont chacune se considérait bien entendu comme la seule 
authentique—et dufait qu’àbiendes égardsleclivagegauche-droiteapparaît 
aujourd’hui deplusenplusrelatif, maisaussi dufaitmêmedel’extrêmeoriginalitéde 
la pensée évolienne, qui semble la rendre irréductible à toute famille politique 
instituée. 
Déterminer et qualifieravecexactitudelapositionpolitiqued’Evolaest enfait plus 
difficilequ’il n’y paraît. Beaucoupdechoses, àcommencer par sacritiquedela 
démocratieet sesprisesdepositionenfaveur d’uneformed’autoritétranscendante 
et absolue, le rapprochent à première vue du courant monarchiste et contre- 
révolutionnaire. Il s’est d’ailleurs lui-même déclaré maintes fois partisan de la 
monarchie. « Onpeut affirmer avecdesolidesraisons, écrit-il par exemple, qu’une 
vraie Droitesans monarchie est privée de son centre de gravité et de fixation 
naturel »(74). Ouencore : « Il nousest trèsdifficiledeconcevoirunevraieDroiteen 
l’absenced’unemonarchie »(75). Cependant, sonanti-christianisme, sonapologie 
des« sociétésd’hommes », safaveurpourlesdoctrinesésotériqueset orientales, sa 
condamnationdelapolitiquedesroisdeFrance, voirelamanièredont il fait aller 
rigoureusement depair monarchismeet aristocratisme(76), peuvent difficilement 
êtreacceptés(et defait ont fréquemment étérejetés) par lesmilieuxroyalisteset 
contre-révolutionnaires. Lui-mêmen’aurait d’ailleursjamaispusouscrireàl’opinion 
deLouis deBonaldselonlaquelle« l’hommen’existequepour lasociété, et la 
sociéténeleformequepour elle »(77). Sacritiquedesroyaumesnationauxet de 
l’Etat-nationl’éloigneparailleursradicalementdelafamillenationaliste. Inversement, 
sa conception absolutiste de la souveraineté contredit d’emblée les idées 
fédéralistes, selonlesquellesc’est du« bas »quedoit provenirlavolontédefédérer 
lesautonomieslocales. Sapensée, enfin, apparaît inconciliableavecl’écologisme 
intégral, qui prôneun« retouràlaTerre-Mère »et refusedelaisserl’hommeimposer 
sans retenue sa « forme » à l’environnement, idées dans lequelles il n’aurait 
certainement puvoir quedenouvellesmanifestationsd’unesprit « naturaliste »et 
« féminin » (78). 
Onl’aparfoisprésentécommelepluséminent représentant italiendecevaste 
courant delapenséepolitiqueallemandedesannéesvingt et trenteauquel ona 
donnélenomde« Révolutionconservatrice ». Cen’est pasentièrement faux, et il 
est certainqu’il s’est lui-mêmesenti proched’aumoinscertainsreprésentantsdece 
courant. Onsait durestequependant unegrandepartiedesavie, Evolas’est tourné 
versl’Allemagne, nonseulement parcequesadoctrineleportait tout naturellement 
versla« LumièreduNord », maisencoreparcequ’il espérait trouver danscepays, 
dont il parlait parfaitement lalangue, unereconnaissancequ’avant ladernièreguerre 
mondiale, il n’avait guère pu trouver dans le sien. Pourtant, cette étiquette de
« révolutionnaire conservateur » ne lui convient qu’imparfaitement. 
Lesmilieux« völkisch », qui furent lespremiersàs’intéresser àlui enraisonde 
son « paganisme » (79), s’aperçurent rapidement que l’idée qu’il se faisait des 
origines« nordiques »différait totalement delaleur. S’ilspouvaient s’accorder avec 
songoût pour l’ésotérisme, cesmilieuxnepouvaient eneffet accepter unevision 
purement métaphysiquedel’antiquité« indogermanique », sansracinesimmédiates 
danslesanget lesol. Lacritiquefaitepar Evoladelanotiondepeuple(Volk), son 
antinatalismeet sonantibiologismeaffirmés, sonélitisme, sespositionsfavorablesà 
un« Ordre »composéd’hommescélibataires, sesituaient auxantipodes deleur 
propre idéal, communautaire, populiste et assurément plus aristo-démocratique 
qu’aristo-monarchique. Danscesmilieux, déjàpeufavorablesàlalatinité(« Losvon 
Rom ! »était l’undeleursmotsd’ordrefavoris), leprimat attribuéàl’Etat parEvolaet 
son hostilité envers les valeurs féminines (80) ne pouvaient être regardés que 
comme des traits « typiquement méditerranéens ». Evola n’eut d’ailleurs pas de 
contacts très durables avec les Völkische
Il eut unpeuplusdesuccèsaveclegroupedesjeunes-conservateurs(Edgar J. 
Jung, Othmar Spann, WilhelmStapel, Albrecht ErichGünther, Karl AntonRohan, 
etc.), qui étaient par principeplusouvertsaumondelatinet aveclesquelsil eut 
l’occasion d’engager une relation plus suivie. Au lendemain de son discours 
prononcéen1934àBerlindevant leHerrenklub, queprésidait lebaronHeinrichvon 
Gleichen, il put mêmeéprouver lesentiment d’évoluer dansson« milieunaturel ». 
Maislàencore, il nefaut pasexagérer l’impact quesesidéespurent avoir. Malgré 
quelqueséchosfavorables—letémoignagedeGottfriedBennsurRévoltecontrele 
mondemoderne, qui fut traduit enAllemagneen1935, est régulièrement cité—, la 
réceptiondelapenséeévolienneenAllemagnen’ajamais euavant 1945qu’un 
impact assezlimité. Mêmedanslesrevuesjeunes-conservatrices, oùlenomd’Evola 
apparaît parfois, il n’ajamaisconstituéunevéritableréférence. Laraisonmajeureen 
estprobablement quelaconceptionévoliennedumondefaisaitappel àdesconcepts 
métaphysiques « traditionnels » trop éloignés d’une mentalité néoconservatrice 
germanique largement façonnée par l’héritage romantique. La notion d’Empire 
(Reich) tout commel’« éthiqueprussienne »occupaient certes unegrandeplace 
danslespréoccupationsdesjeunes-conservateurs, qui sesont toujoursintéressésà 
ladimensionhistoriquedesproblèmespolitiques, et chezqui l’élément aristocratique 
était enoutrebienreprésenté. L’intérêt portéparEvolaàla« Traditionprimordiale », 
àla« spiritualitéolympienne »ou, plusencore, àl’ésotérismeleurétait enrevanche 
assezétranger. Chez laplupart d’entreeux, lanotiondeVolkconservait depuis 
Herder unechargeéminemment positiveet, suivant latraditiongermanique, il leur 
paraissait extravagant de placer, comme c’était le cas dans l’anthropologie 
« traditionnelle »àlaquelleadhérait Evola, l’« esprit », qu’ilssuspectaient volontiers 
devéhiculer uneconceptionabstraiteet rationaliséedel’existence, au-dessusde 
l’« âme », qu’ils regardaient au contraire comme la dépositaire privilégiée de 
l’« authenticité » du peuple (81). 
Lacritiquequefait Evoladelatechniquepourrait amener àlerapprocher de
Heidegger, maissamétaphysiqueest inconciliableavecl’ontologieheideggerienne, 
qu’il dénonced’ailleursavecuntotal manquedenuancesdansMasqueset visages 
duspiritualismecontemporain. Sacritiquedel’obsessionéconomisteet l’importance 
centrale qu’il attribue à l’Etat (dont il fait lui aussi le grand katechon, le grand 
« ralentisseur » du déclin) pourraient de même le placer au voisinage de Carl 
Schmitt, maissonrefusdereconnaîtrel’autonomiedupolitique, enmêmetempsque 
sonindifférencepourlesquestionsconstitutionnelles, soninsistancesurlecaractère 
« éthique » de la souverainetéet la façondont il soutient que la « signification 
originelledel’Etat »renvoieà une« formationsurnaturelle »(82), l’enéloignent 
complètement. Il est par ailleurstout aussi loindu« premier Jünger »—malgré 
l’intérêt justifiéqu’il aportéauTravailleur(83) —, enraisondelafaveur quecelui-ci 
accordait àlatechnique, quedu« second Jünger », enraisondesespréoccupations 
« naturalistes ». Quant àSpengler, il alui-mêmeeul’occasion, danssapréfaceàla 
premièreéditionitalienneduDéclindel’Occident, dont il fut letraducteur, d’expliquer 
enquoi saproprethéoriedes cycles différait del’approchespengleriennedela 
« morphologie » des cultures (84). Bref, il n’y a aucun auteur de la Révolution 
conservatrice auquel on pourrait véritablement l’assimiler ni même le comparer. 
Fascisme et national-socialisme 
Ses relations avec le fascisme et le national-socialisme sont encore plus 
complexes. Cen’est pasici lelieud’examiner dansledétail cequefut laviede 
JuliusEvoladurant leVentenniomussolinien, ni l’évolutiondesesidéesdurant cette 
période. Il s’en est lui-même longuement expliqué dans les deux éditions 
successivesdesonlivresurlefascisme(85), ainsi quedanssonautobiographie. On 
rappelleraseulement qu’il fut jusqu’en1928aumoinsl’ami duministreGiuseppe 
Bottai, et plusdurablement celui deGiovanni Preziosi, qui lui ouvrit lescolonnesde 
sarevueLaVitaitaliana, et deRobertoFarinacci, qui lui permit àpartir de1934de 
disposer deux foispar mois d’unepagespéciale(« Dioramafilosofico ») dans le 
quotidienIl Regimefascista. Il rencontrapar ailleurs Mussolini deuxoutroisfois 
pendant la guerre (86). 
Evolalançaenfévrier 1930unerevueintituléeLaTorre, qui, critiquéedurement 
parcertainsmilieuxofficiels, dutcesserdeparaîtredèsle15juindelamêmeannée, 
aprèsavoir publiéseulement dixnuméros(87). Danslecinquièmenuméro, datédu 
1er avril, il écrivait : « Nous ne sommes ni “fascistes” ni “antifascistes”. 
L’“antifascisme”est nul. Maispour nous[...] ennemisirréductiblesdetouteidéologie 
plébéienne, detouteidéologie“nationaliste”, detouteintrigueet esprit de“parti” [...] 
lefascismeest troppeu. Nousvoudrionsunfascismeplusradical, plusintrépide, un 
fascisme vraiment absolu, fait de force pure, inaccessible à tout compromis ». 
Ceserait ungravecontresensd’interpréter ceslignes, qui ont étésouvent citées 
(88), commelapreuvequ’Evolaaurait souhaitéunfascismeplusextrémiste, « plus 
fasciste »encorequ’il nelefut. Le« fascismevraiment absolu »dont parlait Evola 
était enfait unfascismequi aurait fait sienslesprincipesabsolusdelaTradition,
c’est-à-direun fascismequi aurait ététout àla fois « plus radical »et... moins 
fasciste. Ce « superfascisme » était en réalité un suprafascisme. C’est ce qui 
apparaît clairement dans ladéclarationquedevait faireEvolaàsonprocès, en 
1951 : « J’ai défendu, et jedéfends, des“idéesfascistes”, nonentant qu’ellesétaient 
“fascistes”, mais dans lamesureoùellesreprenaient unetraditionsupérieureet 
antérieure au fascisme, où elles appartenaient à l’héritage de la conception 
hiérarchique, aristocratique et traditionnelle de l’Etat —conception ayant un 
caractèreuniversel et qui s’est maintenueenEuropejusqu’àlaRévolutionfrançaise. 
Enréalité, lespositionsquej’ai défendueset quejedéfendsentant qu’homme[...] 
nedoivent pasêtredites“fascistes”, maistraditionnelleset contre-révolutionnaires » 
(89). Ce à quoi adhère Evola, c’est donc bien à une conception du monde 
« supérieureet antérieure »aufascisme, uneconception« d’AncienRégime », ayant 
un« caractèreuniversel »et àlaquelleselonlui lefascismen’aquepartiellement 
adhéré. Cequi revient trèsprécisément àdirequ’il n’appréciait danslefascismeque 
cequi n’était passpécifiquement fasciste—ou, si l’onpréfère, qu’il rejetait cequ’il y 
avait de plus spécifiquement fasciste dans le fascisme. 
Quandonlit lelivrequ’Evolaaconsacréaufascismeet aunational-socialisme, on 
constated’ailleursquelesreprochesqu’il adresseàcesdeuxrégimespolitiquesne 
sont pasminces. Danslefascisme, il critiquelarhétoriquenationaliste, l’idéedeparti 
unique, la tendance « bonapartiste » et plébiscitaire du régime, ses aspects 
moralisateurs et petits-bourgeois, l’échec de sa politique culturelle, sans oublier 
l’accent missurl’« humanismedutravail »(Giovanni Gentile), qu’il interprètecomme 
une sorte d’appel à « une involution de la politique dans l’économie ». On ne 
s’étonnerapas, enrevanche, qu’il metteaucrédit dufascismed’avoir « relevéen 
Italiel’idéed’Etat », et d’avoir affirméavecforcelaprimautédecedernier sur le 
peuple et la nation. 
Vis-à-vis du national-socialisme, il est plus sévère encore. Synthétisant un 
ensembledecritiquesqu’il eut l’occasiondedévelopper danssesarticlesdèsle 
début desannéestrente(90), il attribueaurégimehitlérienlemérited’avoirperçula 
nécessitéd’une« luttepour lavisiondumonde », maisc’est pour rejeter aussitôt 
presque toutes les composantes de cette vision. C’est ainsi qu’il dénonce le 
pangermanisme, le nationalisme ethnique et l’irrédentisme, l’idée même d’un 
socialisme« national », leracismebiologique—qu’il définit commeassociant « une 
variantedel’idéologienationalisteàfondpangermanisteet desidéesduscientisme 
biologique »(91) —, ledarwinismesocial, la« mégalomanieeffective »deHitler, 
avecses« lubiesmillénaristes »et son« esprit complètement plébéien », le« mythe 
du Volk » et l’importance donnée à la « communauté populaire » 
(Volksgemeinschaft), l’idéalisation de la fonction maternelle chez la femme, 
l’exaltationdela « noblessedutravail »et l’égalitarismeinhérent auService du 
travail (92), laliquidationdel’Etat prussienet delatraditiondesJunkers, lesaspects 
« prolétariens »d’unrégimedépourvudetoute« légitimitésupérieure », et mêmeun 
antisémitisme qui, dit-il, prit chez Hitler la forme d’un « fanatisme obsessionnel ». 
On le voit, la liste est longue. Et pourtant, il est incontestable qu’Evola a
également considéré que le fascisme et le national-socialisme se situaient 
globalement « duboncôté ». Si d’unepart, il neleurapasménagésescritiques, de 
l’autre, il aexplicitement présentécescritiquescommetémoignant, nonpasd’une 
oppositiondeprincipe(« l’antifascismeest nul »), maisplutôt d’unevolontéoud’un 
désirde« rectifier »cequi lui apparaissait commeautant d’erreursoud’insuffisances 
graves. Pour direleschosesautrement, alorsqu’Evolan’ajamaisétéfascisteni 
national-socialisteausensstrict duterme, il n’enapasmoinseulesentiment que, 
tout comptefait, cesrégimesvalaient quandmêmemieuxqueleursadversaires, et 
que leurs nombreux défauts pouvaient être « corrigés ». Ce sentiment peut 
surprendre, car lorsqu’onvoit tout cequ’Evolareprocheaufascismeet aunational- 
socialisme, onse demande parfois ce qui reste encore qui soit susceptible de 
susciter sa sympathie. C’est donc sur ce sentiment qu’il faut s’interroger. 
Il nefait pasdedoutequecedont Evolacrédited’abordlefascismeet lenational- 
socialisme tient dans leur « anti-illuminisme » et leur antidémocratisme affiché. 
Fascismeet national-socialisme représentent fondamentalement àses yeux une 
réactioncontrelesidéesde1789, et mêmesi laformedonnéeàcetteréactionaété 
despluscontestables—puisqu’il constatechezeuxlaprésencepersistantedetraits 
typiquement « démocratiques »—, il restequepour lui unetelleréactionétait au 
départ salutaire. Evolaentireladoubleconclusiondelaparentédefonddufascisme 
et dunational-socialisme, et delapossibilitédeles« rectifier »dansunsensplus 
« traditionnel »enles« ramenant àleursoriginespropres ». Lefait quecesdeux 
régimes aient eu à combattre les mêmes adversaires que lui, des démocrates 
libéraux aux socialistes et aux communistes, était évidemment de nature à le 
confirmer dans cette opinion. 
Cequel’historiographiecontemporaineapermisd’établiràproposdufascismeet 
dunational-socialismeconduit cependant àsedemandersi, danscetteappréciation, 
JuliusEvolanes’est pastragiquement trompé. Il n’est eneffet nullement évident que 
lesrégimesfascisteet national-socialisteaient véritablement appartenuau« même 
monde », et moins évident encore qu’ils se soient jamais inscrit dans l’univers 
spirituel d’Evola, c’est-à-dire dans cette « tradition supérieure et antérieure », à 
« caractère universel », qui aurait véhiculé depuis toujours la « conception 
hiérarchique, aristocratique et traditionnelle de l’Etat » qui s’est « maintenue en 
Europe jusqu’à la Révolution française ». Le caractère totalitaire du national- 
socialismenesaurait aujourd’hui êtresérieusement contesté, alorsquelefascisme 
est plusgénéralement classéparmi lesrégimesautoritaires. DeRenzoDeFeliceà 
Ernst Nolte, lesdifférencesd’inspirationidéologiquedesdeuxrégimesont enoutre 
étémaintesfoissoulignées. Révélateur est àcet égardlefait que, pour Evola, le 
mériteprincipal dufascismefut d’avoir affirméla« prééminencedel’Etat sur le 
peupleet lanation », alorsquec’est précisément cequelesthéoriciensnationaux- 
socialisteslui reprochaient leplus. Laparentédurégimenational-socialisteavecle 
régimebolchevik, qui est sansdoutelaformepolitiquequi répugnait leplusàJulius 
Evola, est par ailleurs aujourd’hui de mieux en mieux reconnue, comme en 
témoignent, pour neciter qu’eux, lestravaux deHannahArendt, RaymondAron, 
FrançoisFuret ouStéphaneCourtois. Enfin, lelienprofonddesdeuxrégimesavec 
cette modernité qu’Evola rejetait de toutes ses forces, a lui aussi été mis en lumière à
maintes reprises. Derrière une rhétorique volontiers archaïsante, fascisme et 
national-socialisme ont constitué des phénomènes résolument modernes qui, comme 
tels, donnaient uneimportancecentraleaudéveloppement scientifique, techniqueet 
industriel, enmêmetempsqu’ilsfaisaient unelargeplaceàlamobilisationpolitique 
des masses. Mussolini l’avait d’ailleurs déclaré avec netteté : « Les négations 
fascistesdusocialisme, deladémocratie, dulibéralisme, nedoivent [...] pasfaire 
croirequelefascismeentendramener lemondeàcequ’il était avant 1789, datequi 
est considéréecommel’annéed’inaugurationdusiècledémo-libéral. Onnerevient 
pas en arrière. La doctrine fasciste n’a pas choisi de Maistre pour prophète » (93). 
Caractéristiqued’unetelleéquivoqueest l’attentionqu’àl’intérieur duIIIe Reich 
EvolaaportéeàlaSS, trèsprobablement parcequecelle-ci seprésentait commeun 
« Ordre »et quelanotiond’Ordrejouait, commeonl’avu, unrôlecentral danssa 
penséepolitique. Evolaeut d’ailleursl’occasion, en1938, d’effectuerpourlecompte 
delarevuedePreziosi unreportagesur lescélèbres« Ordensburgen »nationaux- 
socialistes (94). Maisderrièreunmêmemot peuvent secacher des réalités fort 
différentes. Himmler pouvait bienêtrepersonnellement fascinépar lesChevaliers 
teutoniqueset lesouvenir des« anciensGermains », saconceptiondumonden’en 
était pasmoinsauxantipodesdecelled’Evola. LaSSn’était elle-mêmenullement 
conçue comme une « société d’hommes », comme une « élite définie par une 
solidaritéexclusivement virile »et tendant àla« personneabsolue » : chacundeses 
membresétait aucontrairetenudefonder unfoyer s’inscrivant dansune« lignée 
héréditaire ». Plusencorequeleparti nazi lui-même, laSSfaisait du« matérialisme 
biologique » le centre même de sa vision du monde (95). 
Evolan’adoncprobablement paspristoutelamesuredelavolontédufascismeet 
dunational-socialismedelutter contrelesidéologiesqu’il combattait lui-même, non 
seulement pardesmoyensmodernes, maiségalement aunomd’uneautreformede 
modernité. D’oùtoutel’ambiguïtédesaposition. Il appréciait danslefascismecequi 
n’était passpécifiquement fasciste, mais« traditionnel », tout encroyant possiblede 
« rectifier »lefascismeenl’amenant àabandonner cequi lui appartenait enpropre 
—sous-estimant ainsi l’importancedecequi, danslefascisme, faisait qu’il était le 
fascisme et non pas autre chose. Philippe Baillet a pu parler à ce propos de 
« surestimation des potentialités “réactionnaires” » du fascisme et du national- 
socialisme, « àcausedelaquelle[Evola] passaàcôtédecequi fondait enpropre 
cesdeuxrégimeset leurconférait leurspécificité »(96). Laquestionquel’onpeut se 
poserest desavoirsi lefascisme« rectifié »commelesouhaitait Evolaaurait encore 
eu quelque chose à voir avec le fascisme. 
L’influence politique d’Evola 
L’influenceproprement politiquedeJuliusEvolan’avéritablement commencéà 
s’exercerqu’aprèslaDeuxièmeGuerremondiale, singulièrement aprèslapublication 
d’Orientationset des Hommesaumilieudes ruines. C’est d’ailleurségalement à 
partir desannéescinquantequesesadversairesont commencéàvoir enlui, de
manière excessivement sommaire, un « doctrinaire fasciste », alors qu’il n’avait 
guèreétéreconnucommetel souslefascismeréellement existant. Cetteinfluence 
politiques’est évidemment exercéed’abordenItalie, avant desemanifester en 
Franceàpartir dudébut desannéessoixante-dix, puisenEspagne, enAmérique 
latine, en Allemagne et dans les pays de l’Est. 
Il nefait pasdedoutequelapenséepolitiqueévolienneasurtout séduit des 
courantsapparentésdirectement ouindirectement àladroiteradicale. Desgroupes 
se réclamant d’une « droite révolutionnaire » ont trouvé dans son œuvre une 
cohérencedoctrinaleincontestable, enmêmetempsquedesmotsd’ordred’une 
radicalité critique propres à conforter leurs positions. D’autres groupes, 
sympathisantsd’un« fascismeextrême », voireparfoisdunational-socialisme, ont 
également reprisàleur comptecertainesdesesidées, enpassant soussilenceles 
critiques extrêmement dures qu’il avait adressées au régime hitlérien. Mais 
l’influencepolitiqued’Evolanes’est paslimitéeàcesmilieux. Des royalistesont 
également pu tirer profit de ses multiples plaidoyers en faveur du système 
monarchique. Des individualistes radicaux se sont appuyés sur sa pensée pour 
justifier leur mépris narcissique de la « plèbe » et leur détestation du monde 
moderne. Dejeunesmilitantsdespartisdedroiteclassiquesont trouvédansses 
livres de quoi nourrir une intransigeance à laquelle leurs propres dirigeants ne 
répondaient pas. Et mêmecertainscatholiquestraditionalistesont pus’inspirer de 
sonapologiedela« Tradition »,ainsi qu’enatémoignéFaustoGianfranceschi, selon 
qui, malgrélescritiquessouvent méprisantesadresséespar Evolaauchristianisme, 
« sesouvrages, paradoxalement, réussissaient, chezceuxd’entrenousqui étaient 
[catholiques], àrenforcerlaconvictionquelaphilosophiepérennedel’Egliseétait la 
seuleformedepenséevivanteouinstitutionnaliséecapablededicter desrègles 
d’actionet dejugement àceuxqui neselaissaient pascapter par lesidéologies 
matérialistes » (97). Cette diversité est elle aussi significative. 
Si Evola a séduit la droite radicale, c’est évidemment d’abord par sa propre 
radicalitéidéologique, par sacritiquesanscompromisdumondeactuel, commepar 
sacapacitéd’opposer àlamodernitétriomphanteunesériedenégationsabruptes, 
contrepartiechezlui d’unensembled’« affirmationssouveraines ». Maislafaveur 
dont il atoujoursjoui danscesmilieuxn’est pasnonplusexempted’ambiguïté. La 
droite radicale, par exemple, s’est toujours plus volontiers déclarée 
« révolutionnaire »que« réactionnaire ». Cen’est paslecasd’Evola. Il lui est certes 
arrivéd’écrire, enréférenceimpliciteàlaRévolutionconservatriceallemande, que 
« parrapport àtout cequi formeaujourd’hui lacivilisationet lasociétémodernes, on 
peut direeffectivement querienn’est aussi révolutionnairequelaTradition »(98). En 
règlegénérale, cependant, il s’est plutôt montréréticent àutiliser ceterme, mettant 
fréquemment engardecontrel’« âmesecrète »dumot « révolution », tandisqu’il a 
constamment fait reproche à la Droite de ne pas oser s’affirmer fièrement 
« réactionnaire »—si bienquel’onpourrait direquesapensée, fondéesur l’« idée 
hiérarchique intégrale », exprime avant tout une forme particulière de radicalité 
réactionnaire.
Demême, ladroiteradicaleafréquemment étéplusadmiratricedufascismedela 
Républiquesocialequedufascisme« classique »d’avant 1943. Or, làencore, Evola 
professait l’opinioninverse. Il avait certesdel’admirationpour l’« aspect combattant 
et légionnaire »(99) delaRépubliquesociale, maisletournant « républicain »du 
fascismedeSaló, considérépar certainscommeun« retour auxsources »initiales 
dumouvement, représentait àsesyeuxune« régressioninvolutive » : « Denotre 
point devue, écrit-il, il n’yaàcet égardrienàtirer dufascismedelaRépublique 
sociale » (100). 
La droite radicale, enfin, a souvent manifesté une sympathie plus ou moins 
expliciteenversn’importequelleformederadicalité, mêmedegaucheoud’extrême 
gauche. Cettedroite, d’unefaçongénérale, tendàs’identifierau« peuple », àprôner 
unsocialisme« national », àseposer en« gauchedeladroite », et sedéclare 
volontiersplusproched’unrévolutionnairedegauche, fût-il bolchevik(ou« national- 
bolchevik »)qued’unbourgeois. Evola, dont il faut aupassageremarquerqu’il atrès 
rarement désavouéceuxqui seréclamaient delui, n’ajamaisadoptéaucunedeces 
attitudesni soutenuaucunedecesopinions. Saméfiancevis-à-visdu« peuple », 
sonrefus explicitedecequ’il appelait l’« idéal social », sonhostilitéextrêmeau 
bolchevismel’enempêchaient demanièreabsolue. Il affichait certesunpoint devue 
nettement « antibourgeois », mais c’était pour souligner aussitôt que le 
bourgeoisismepeut être contesté« par lehaut »aussi bienque« par lebas », 
ajoutant quel’antibourgeoisismedegauche, ouvrier ousocialiste, doit êtrerejeté 
parcequ’il mène« encoreplusbas ». PourEvola,tout dépendaitenfindecomptede 
ceaunomdequoi ondéclarait vouloircombattrelabourgeoisie. L’antibourgeoisisme 
était pour lui acceptable, et même nécessaire, au nomd’une « conception 
supérieure, héroïqueet aristocratiquedel’existence »(101), maisil nel’était pasau 
nomde n’importe quel idéal. De même, bien qu’il lui soit arrivé de créditer 
l’américanisme ou le libéralisme d’un pouvoir dissolvant supérieur à celui du 
communisme(102), il n’est pasdouteuxquelebolchevismereprésentait pour lui 
quelquechosedebienpirequelelibéralismebourgeois, précisément parcequ’il 
correspondait danssonsystèmeàuneaggravation, àunpoint d’aboutissement (la 
« nuit »par rapport au« crépuscule »). C’est encoreunpoint sur lequel sapensée 
s’écartedecelledeladroiteradicaleou« révolutionnaire », pourlaquellelerègnedu 
libéralismebourgeoisest bienpireencore, plusdestructeur et plusdécomposant, 
que le communisme ne l’a jamais été. 
Retour à l’« apoliteia » 
Les dernières lignes des Hommes au milieu des ruines contiennent une 
interrogationanalogueàcellequi figurait déjàenconclusiond’Orientations : « Reste 
àvoir combienil rested’hommesdemeurant encoredebout, parmi tant deruines ». 
Implicitement, cetteinterrogationrevient àposer laquestiondelapossibilitémême 
d’uneactionpolitiquequi s’inspireraitdesprincipes « traditionnels ».Acettequestion, 
Evola n’a pas tardé à répondre lui-même par la négative. Dès 1961, dans 
Chevaucher letigre, il soulignait « l’impossibilitéd’agir demanièrepositivedansle 
sensd’unretour réel et général ausystèmenormal et traditionnel »(103). Dansson
autobiographie, parueen1963, il affirmait sa« convictionqueriennepeut êtrefait 
pour provoquer unemodificationimportantedanscettesituation, pour agir sur des 
processusqui ont désormais, aprèslesderniersécroulements, uncoursirréparable 
[...] Il n’existeplusrien, dansledomainepolitiqueet social, qui méritevraiment un 
total dévouement et un engagement profond » (104). Un an plus tard, dans la 
premièreéditionduFascismevudedroite, il déclarait : « Il faut direqu’aujourd’hui il 
n’yapasenItalieuneDroitedignedecenom »(105). Enfin, peudetempsavant sa 
mort, dansladeuxièmeéditionduCheminduCinabre, il écrivait : « Endehorsde 
l’adhésion de représentants des jeunes générations, attirés surtout par les 
fondementsquelesdoctrinestraditionnellesoffrent àuneorientationdeDroite, les 
personnes qualifiées arrivées àmaturitéqui, dans ledomainedes études et en 
partant despositionsquej’ai défenduesoufait connaître, sont alléesplusloinpar 
desdéveloppementspersonnelssérieux, méthodiqueset médités[...] cespersonnes 
sont pratiquement inexistantes » (106). 
C’est précisément parcequ’il s’était convaincu que rienne pouvait plus être 
accompli dansledomainedesfinsextérieures, qu’Evolapublieen1961Chevaucher 
letigre, ouvragedans lequel il s’efforced’indiquer ànouveaudes « orientations 
existentielles », mais cettefois dans uneperspective strictement « individuelle ». 
Sansbienentendumodifier enquoi quecesoit sesprincipes, JuliusEvola, dansce 
livre, abandonne radicalement toute perspective politique et rabat ce qu’il est 
possibledefairesur lefor intérieur. « Nousavonsfait allusion, écrit-il [...] aupetit 
nombredeceuxqui, aujourd’hui, par tempérament et par vocation, croient encore, 
malgrétout, àlapossibilitéd’uneactionpolitiquerectificatrice. C’est pour guider 
l’orientationidéologiquedeceux-làquenousavonsécrit, il yaquelquesannées, Les 
hommesaumilieudes ruines. Mais, enraisondes expériencesquenous avons 
faites depuis, nous ne pouvons pas ne pas reconnaître ouvertement que les 
conditionsnécessairespouraboutiràunrésultat quelconque, appréciableetconcret, 
dansuneluttedecegenre, font actuellement défaut [...] Laseulenormevalableque 
cet homme[celui qui restefidèleàlaTradition] puissetirer d’unbilanobjectif dela 
situation, c’est l’absenced’intérêt et ledétachement àl’égarddetout cequi est 
aujourd’hui “politique”. Son principe sera donc celui que l’Antiquité a appelé 
l’apoliteia » (107). 
Rien ne pouvant plus être accompli dans le domaine politique, mieux vaut 
désormais prendre congé et se réfugier dans l’apoliteia, c’est-à-dire dans le 
détachement. Evolainvitedoncles« hommesdifférenciés », ceuxqui sesentent 
« absolument horsdelasociété », à« abandonner tout but positif extérieur, rendu 
irréalisable par une époque de dissolution comme la nôtre » (108), pour se 
concentrer sur l’« agir sansagir », sur laconstructionet leperfectionnement desoi, 
sur la conquête d’une position spirituelle inexpugnable, d’une patrie intérieure 
« qu’aucunennemi nepourrajamaisoccuper ni détruire »(109). Cettepositionn’est 
passansévoquer celledel’Anarqued’Ernst Jünger, sanstoutefoisseconfondre 
avecelle. Ellerendobsolètetouteespérancepolitiqueet découragetoutevelléité 
d’action dans la vie publique : « Rien ne peut être fait » (110).
Il semblebienqu’Evolaait alorsrefermécommeunelongueparenthèse, pour en 
reveniràcertainesattitudesdesajeunesse« rectifiées »par sonitinéraireintérieur. 
C’est cequ’il diralui-mêmelorsqu’évoquant Chevaucher letigre, il écriradansson 
autobiographie :« Uncyclesefermeaveccelivre,encesensquejesuisenquelque 
sorterevenuauxpositionsdedépart, verslesquellesm’avait poussédansmaprime 
jeunesse une impulsion profonde, bien que parfois inconsciente, qui devait me mener 
àunenégationradicaledesvaleurset dumondeexistants »(111). Lerepli surlefor 
intérieurramèneeneffet àl’époquedel’Individuabsolu, decet individusolitairequi, 
ne voulant dépendre de rien d’extérieur à lui-même, et regardant donc 
nécessairement l’Autrecommeprivation, altérationoudéficiencecontaminante, en 
était venu à la « négation radicale du monde existant ». 
Quellessont lesraisonsdecetteimpossibilitéd’unepolitique« traditionnelle » ? 
Cellesdont fait état Evolasont bienentendustrictement conjoncturelles : cesont les 
circonstancesdumoment qui interdisent lamiseenœuvreconcrètedetout principe 
politique« vrai ». Cescirconstancesétant apparemment liéesàl’état dedégradation 
oudedissolutiondumondeextérieur, il est légitimed’enconclurequ’il yaunrapport 
direct entrelefait qu’onnepuisseplusrienfairesur leplanpolitiqueet lefait que, 
danslaconception« traditionnelle »del’histoirequi est celled’Evola, lemoment 
actuel correspond à une « fin de cycle », phase crépusculaire, terminale, 
fréquemment assimiléeaukali-yugadesIndiensouàl’« âgeduloup »delatradition 
nordique. 
Maisil est clairquecetteidéede« findecycle »apar elle-mêmequelquechose 
deparalysant oud’incapacitant. Si l’onvit dansunefindecycleet si riennepeut 
empêchercecycled’alleràsonterme, oùpeut bienrésiderla« libertéfondamentale 
demouvement », sinondanslefor intérieur ?C’est cequ’avait biencomprisAlain 
Daniélou, qui écrivait : « Dansunmondequi court àsaperte, selonlathéoriedes 
cycles,il n’yadesalut qu’individuel »(112). Dansunetelleperspective, il yaeneffet 
quelque paradoxe à prôner une action politique quelle qu’elle soit, puisque 
l’accomplissement du cycle actuel et le surgissement d’un nouveau cycle sont 
censés résulter, non de l’action des hommes, mais des lois absolues de la 
métaphysique. L’actionpolitiquesupposel’espoir deparvenir àunbut. Or, quel but 
peut-ons’assigner dansunmondequi est vouéàsafin ?L’actionpolitiqueimplique 
aussi, pardéfinition, laréversibilitédessituationsjugéesindésirables. Or,dupointde 
vuedelathéoriedescycles, lacrisedumondemodernesecaractérisepar son 
irréversibilité. Quand Evola déclare que la bataille est déjà « matériellement 
perdue », oncomprendsanspeineque, perduematériellement, ellepeut nepas 
l’être spirituellement. Mais quel sens politique donner à ce propos ? 
Evolaécrit pourtant que« cesont les hommes, tant qu’ils sont vraiment des 
hommes, qui font et défont l’histoire »(113). Maisil dit aussi quel’histoireest une 
« entitémystérieuse »qui « n’existepas », qu’ellen’est qu’un« mythe »quel’ondoit 
« combattre »: « penser entermesd’histoireest absurde ». Enfin, il dénoncetout 
historicisme, enallant jusqu’àécrirequelorsqu’onarejetél’historicisme, « lepassé 
cessed’êtrequelquechosequi déterminemécaniquement leprésent »(114). Jean-
Paul Lippi en conclut que « la critique fondamentale qu’Evola adresse à 
l’historicisme, c’est quecelui-ci rendimpossibleàqui l’adoptetouteprisedeposition 
volontariste et par conséquent véritablement libre » (115). La question se pose 
toutefoisdesavoirsi cepoint devueest pluscompatibleaveclathéoriedescycles. 
Levolontarismepolitiquen’est-il pasrendutout aussi « impossible »parl’affirmation 
d’un déclin obligé que par celle d’un progrès inéluctable ? 
Enréalité, cequ’Evolarejetteleplusfoncièrement, cen’est pastant l’historicisme 
proprement dit que l’optimisme inhérent aux formes modernes d’historicisme, à 
commencer par l’idéologieduprogrès. Letableaugénéral qu’il dressedansRévolte 
contrelemondemoderne, par exemple, donneeneffet àl’histoireunsensbien 
précis—àlafoiscommedirectionet commesignification. Evolacherchelui aussi, 
au-delàdusimpleenchaînement desévénements, àidentifier leslignesdefonddu 
développement historique—et lesmomentsoulesétapesdel’histoirequ’il jugeles 
plussignificatifsnediffèrent guèredeceuxquel’idéologieduprogrèsaelle-même 
retenus.Il secontentedelesdoterd’uncoefficientdevaleurrigoureusement opposé. 
Tout en dépeignant les sociétés « traditionnelles » comme des sociétés 
anhistoriques, ou tout au moins indifférentes à l’histoire, Evola ne rejette donc 
nullement lanotionde« sensdel’histoire », qui est d’ailleursinhérenteàlathéorie 
descycles. Interprétantl’histoire, noncommemouvement progressifperpétuellement 
ascendant, mais comme mouvement constamment descendant, comme déclin 
toujoursaccentué, il affirmeseulement quece« sens »est purement négatif : il ya 
bien« progrès »,maisprogrèsdansledéclin(116) ! Révélateuràcetégardest lefait 
qu’il dénonce dans le marxisme une forme évidente d’historicisme, tout en 
reconnaissant àMarxlemérited’avoir tentéde« définir unedirectiongénéralede 
marchedel’histoireenfonctiondephasesbienprécises »(117). C’est pourquoi il 
propose« unschémahistoriographiquequi, enunecertainemesure, correspondau 
schémamarxiste, et qui, commecedernier, considèrelesprocessusgénérauxet 
essentielsau-delàdesfacteurscontingents, locauxet nationaux, maisqui, toutefois, 
indiquecommerégression, écroulement etdestructioncequi, aucontraire, est exalté 
parlemarxismecommeunprogrèset commeuneconquêtedel’homme »(118). En 
d’autres termes, Evola critique fondamentalement l’historicisme au nomd’un 
historicismeensenscontraire, l’idéologiedeladécadenceconstituant commele 
miroir inversé, lecalquenégatif del’idéologieduprogrès : cequi est impensable, 
danslesdeuxcas, c’est quel’histoirepuisseàtout moment rouler dansn’importe 
quel sens. Il enrésulteuneévidentetensionentrecettephilosophiedel’histoire, où 
l’inéluctablerésulted’unesortedefatalitémétaphysique, inhérenteaumouvement 
mêmedel’histoire, et l’importancequedonnepar ailleursEvolaàl’idéedevolonté, 
de puissance absolue et de liberté inconditionnée. 
Mais l’impossibilité d’une politique « traditionnelle » ne résulte peut-être pas 
seulement defacteursliésàlaconjonctureet àlathéoriedescycles. Lapolitique 
queproposeEvolaest unepolitiquequi s’ordonneàdes idéeset des principes 
absolus. C’est en d’autres termes une politique idéale. Or, si l’on pose que la 
politiqueest avant tout l’art dupossible, et quelepossibleest d’abordaffairede 
contexteet desituation, unepolitiqueidéalerisquefort d’apparaîtrecommeune 
contradictiondanslestermes. Sesituant d’embléeauniveaudesprincipes, Evola
placesonexigencetrèshaut, cequi est ensoi louable. Maisleproblèmeavecles 
idéespuresest quelameilleuremanièrequ’ellesont derester puresest dene 
jamaisseconcrétiserdanslaréalité : leshorizonslesplusélevéssont aussi lesplus 
inatteignables. Decepoint devue, il yaunecontradictioncertaineentrelapolitique
qui s’inscrit toujoursdanslerelatif et neconstituejamaisqu’unemodalitédel’action 
historique, et unetraditionqui seveut d’embléemétahistorique, c’est-à-direabsolue. 
Evola, pourrait-ondire, aexercéuneincontestableinfluencepolitiquealorsmême 
que les idées qu’il proposait rendaient l’action politique plus problématique. La 
« politiqueévolienne »—distinctedelacritiqueévoliennedelapolitique—semble 
ainsi conduire à ne plus faire de politique du tout. 
Tant par soncontenuquepar l’influencequecelivreaexercée, Leshommesau 
milieu des ruines constitue sans conteste un ouvrage important du point de vue d’une 
historiographiedesidéesdeDroite. Prèsd’undemi-siècleaprèssapublication, la 
validitéet l’actualitédes idées qu’onytrouveexprimées dépendent évidemment 
dansunelargemesuredudegréd’adhésiondulecteur. Pour notrepart, cesont 
surtout certainesdescritiquesformuléespar Evolaqui nousparaissent denatureà 
inspirer uneréflexionpar ailleursattentiveàl’évolutiondumondeactuel. Mêmesi 
l’on n’en partage pas les prémisses, la critique évolienne de l’Etat-nation, par 
exemple, conserveunefortepertinenceàuneépoqueoùcetteforme politique, 
emblématique de la modernité, apparaît chaque jour un peu plus frappée 
d’impuissanceet d’obsolescence.Il envademêmedesacritiquedela« superstition 
modernedutravail », qui rejoint certainesobservationsdeHannahArendt, enmême 
tempsquecetteprofonderemarquedeFriedrichNietzsche : « Chaquejourletravail 
accaparedavantagelabonneconscienceàsonprofit : legoût delajoies’appelle 
déjà“besoinderepos” ; il commenceàrougir delui-même[...] Ehbien, autrefois, 
c’était le contraire : c’était le travail qui donnait des remords » (119). 
Evolaaégalement eulegrandmérite, àuneépoqueoùlachosen’était passi 
courante, dedénoncer avec forcetouteconceptiongénéraledelavieoudela 
sociétéqui sefondesur leseul plandel’économie, oului attribueendernière 
instanceunrôledécisif. Mêmesi l’onnesait pastoujourstrèsbiensi Evolaseborne 
àramener l’économieàuneplacesubordonnéeous’il lui donneuneimportance 
minime, cequi n’est pastout àfait lamêmechose, onnepeut qu’êtred’accordavec 
lui lorsqu’il affirmeque« cen’est paslavaleur d’unsystèmeéconomiqueoud’un 
autrequ’il faut mettreenquestion, maiscelledel’économieengénéral »(120), ou 
lorsqu’il stigmatiseavecbonheur cetteobsessionéconomistequi « aprisl’homme 
corpset âmeet l’afinalement condamnéàunecoursesansrépit, àuneexpansion 
illimitéedel’agir et duproduire »(121). Evolaledit trèsjustement, « lavéritable 
antithèsenesesitue[...] pasentrecapitalismeet marxisme, maisentreunsystème 
oùl’économieest souveraine, quellequesoit saforme, et unsystèmeoùellese 
trouve subordonnée à des facteurs extra-économiques, à l’intérieur d’un ordre 
beaucoupplusvasteet pluscomplet, denatureàconféreràlaviehumaineunsens 
profond et à permettre le développement de ses possibilités les plus hautes » (122).
Maisendernièreanalyse, et commetoujourschezEvola, c’est sansdoutedansle 
domainedel’éthiquequel’ontrouvechezlui lesconsidérationslespluspropresà 
inspirerlaréflexiondetouslesjours. Ainsi lorsqu’il dit que« lamesuredecequel’on 
peut exiger desautresest donnéepar cequel’onsait exiger desoi-même »(123), 
lorsqu’il rappelleque« lapuissancesefondesurlasupériorité, et nonlasupériorité 
surlapuissance »(124), ouencorelorsqu’il décrit l’antagonismeentrelesystèmede 
l’honneuret ladignitéindistinctementaccordéeàtout unchacun.Endetellespages, 
les hommes autant que les femmes peuvent prendre des leçons. 
A. B. 
1. Onsait qu’Evola, suiteàunbombardement subi àVienneen1945, nerevint àRome, après 
avoir étésoignéenAutriche, qu’aubout detroisannées. Il n’yrestad’ailleursquepour unebrève 
période, puisqu’il passaencoredeuxanset demi dansdifférentescliniquesdeBologne. Evolanese 
réinstalleradefaçondurabledanslacapitaleitaliennequ’auprintemps1951. Cependant, dèslemois 
d’avril 1951, il est arrêté et emprisonné sous l’accusation d’être l’inspirateur de deux groupes 
néofascistesclandestins, lesFAR(Fasci di Azionerivoluzionaria) et laLégionnoire. Il fut acquittéà 
l’issue de son procès, le 29 décembre 1951, après avoir été détenu pendant six mois. 
2. LecheminduCinabre, Archè-Arktos, Milano-Carmagnola1982, p. 162. Nouscitonsici les 
ouvrages d’Evola d’après leur édition la plus récente. 
3. Cf. notamment sonentretienavecGianfrancodeTurris, inIl Conciliatore, 15janvier 1970, pp. 
16-19. 
4. Il aparuenItaliedepuis1950prèsdedouzeéditionsdifférentesd’Orientations, dont uncertain 
nombrequasimentclandestines. S’yajoutentdeuxtraductionsfrançaisesintégrales(« Orientations », 
in Julius Evola, le visionnaire foudroyé, Copernic, Paris 1977, pp. 29-54, trad. Pierre Pascal ; 
Orientations, Pardès, Puiseaux 1988, 94p., trad. PhilippeBaillet), deux traductions espagnoles 
(Orientaciones, Graal, Madrid, et Bau, Barcelona1974, 61p., trad. FrancescoZ. Giorcelli et Sol 
MuñozLafitta ; Orientaciones, Imperium, BuenosAires 1977), ainsi quedes traductionsgrecque 
(« Prosanotolismoi », inAnthropinesSkeseis, Athènes, décembre1972, pp. 28-33et 50, trad. Harry 
Guitakos), néerlandaise(Oriëntaties, CentroStudi Evoliani, Gent-Brussel 1982, 23p., trad. Peter 
Logghe), polonaise (Orientacje, Parzival, Chorzów 1993, trad. Bogdan Koziel) et hongroise 
(Orientációk, StellaMarisKiadó, Budapest 1998, 89p., trad. GáborZsuzsa). Leshommesaumilieu 
desruinesaétérééditésixfoisenItalie, tandisquesatraductionfrançaiseafait l’objet dedeux 
éditions différentes(Les hommes aumilieudes ruines, Sept couleurs, Paris 1972, 252p., trad. 
anonyme ; 2e éd. augm. : GuyTrédaniel-LaMaisnie, Paris, et Pardès, Puiseaux1984, 284p., trad. 
rév. et complétéepar GérardBoulanger). Il enexisteaussi destraductionsespagnole(Loshombres 
ylasruinas, Alternativa, Barcelona1984, 254p., trad. MarcosGhio), allemande(Menscheninmitten 
vonRuinen, Hohenrain, Tübingen1991, 406p., trad. Rainer M. Natlacen) et anglaise(MenAmong 
theRuins. Post-War Reflectionsof aRadical Traditionalist, Inner TraditionsInternational, Rochester 
2002, trad. Guido Stucco). 
5. Cf. notamment lesSaggi di dottrinapolitica. Crestomaziadi saggi politici (Casabianca-Mizar, 
Sanremo 1979 ; 2e éd. : Saggi di dottrina politica, I Dioscuri, Genova 1989 ; trad. fr. : Essais
politiques. Idéeimpérialeet nouvel ordreeuropéen—Economieet critiquesociale— Germanisme 
et nazisme, Pardès, Puiseaux1988), recueil oùl’ontrouvedestextesdéveloppant souvent defaçon 
suggestivedes considérations également présentes dans Les hommes aumilieudes ruinesou 
abordant des sujets non examinés dans ce livre. 
6. Pierre-André Taguieff, « Julius Evola penseur de la décadence. Une “métaphysique de 
l’histoire”danslaperspectivetraditionnelleet l’hyper-critiquedelamodernité », inPoliticaHermetica
1, L’Age d’homme, Lausanne 1987, p. 16. 
7. Julien Freund, L’essence du politique, Sirey, Paris 1965, p. 25. 
8. Qu’est-ce que la politique ?, Seuil, Paris 1982, p. 177. 
9. Révolte contre le monde moderne, L’Age d’homme, Lausanne 1991, pp. 42. 
10. Ibid., p. 41. 
11. Les hommes au milieu des ruines, Guy Trédaniel-Pardès, Paris-Puiseaux 1984, p. 29. 
12. C’est cette attitude que Julien Freund dépeint comme foncièrement « impolitique », la 
reconductiondupolitiqueàlamétaphysiquen’étant àsesyeuxqu’unefaçonparmi d’autresdelui 
dénier uneessenceautonome(pour d’autresauteurs, lapolitiquedoit êtresoumise, rabattueou 
placée dans la dépendance de la morale, du droit, de la technique, de l’économie, etc.). 
13. Préface à la deuxième édition française d’Orientations, Pardès, Puiseaux 1988, p. 9. 
14. Orientations, op. cit., p. 58. 
15. Les hommes au milieu des ruines, op. cit., p. 41. 
16. « Ondevrait étudier desformulesqui transformeraient graduellement l’ouvrier enpropriétaire 
au petit pied » (Les hommes au milieu des ruines, op. cit., p. 172). 
17. « Il faudrait que l’anonymat et le désintéressement propres à l’ancien corporatisme 
resurgissent danslemondedelatechniquesousuneformeinédite, lucide, essentielle »(ibid., p. 
171). 
18. Orientations, op. cit., pp. 55-56. 
19. « Vedute sull’ordine futuro delle nazioni », in La Vita italiana, septembre 1941. 
20. Les hommes au milieu des ruines, op. cit., p. 52.
21. « Lesocialismeest lesocialisme, et lui ajouterl’adjectif “national”n’est qu’undéguisement en 
formedecheval deTroie »(Lefascismevudedroite. Suivi de : Notessur leTroisièmeReich
Pardès, Puiseaux 1993, p. 102). 
22. C’est cetteoppositionàtout cequi est del’ordredelaquantitéet delaseule« nature »qui a 
conduit Evolaàprendreunepositionnettement antinatalisteassezoriginaledanslesmilieux« de 
droite ». N’hésitant pas à parler de« débordement des naissances », et même de « fléaudes 
naissances », enyvoyant unavatar dela« puissancedunombre », Evolaenappelleavecforceà 
une« politiqueantidémographique ». Il nes’interrogetoutefoispasplusavant pour connaîtreles 
raisons de la moindre fécondité démographique des élites. 
23. « Signification de l’aristocratie », in Julius Evola, Tous les écrits de « Ur » &« Krur » 
(« Introduction à la magie »). « Krur » 1929, Archè, Milano 1985, p. 43. 
24. Les hommes au milieu des ruines, op. cit., p. 94. 
25. Orientations, op. cit., p. 51. 
26. Ibid., pp. 77-79. 
27. Ibid., p. 55. 
28. « L’idéeolympienneet ledroit naturel », inL’arcet lamassue, GuyTrédaniel-Pardès, Paris- 
Puiseaux 1983, pp. 77. 
29. Les hommes au milieu des ruines, op. cit., p. 34. 
30. Révolte contre le monde moderne, op. cit., p. 64. 
31. Ibid., p. 383. 
32. Les hommes au milieu des ruines, op. cit., p. 36. 
33. Ibid., pp. 37. 
34. JuliusEvola, métaphysicienet penseurpolitique. Essai d’analysestructurale, L’Aged’homme, 
Lausanne 1998, p. 210. 
35. Ibid., p. 12. Cf. aussi p. 179 : « Touteladoctrinepolitiqueévoliennes’inscrit dansleschéma 
général delabipolaritémasculin-fémininet reposesur laconvictionquel’Etat peut et doit être 
l’expression politique de la virilité spirituelle ». 
36. Métaphysique du sexe, L’Age d’homme, Lausanne 1989, p. 224.
37. Conférencedu10décembre1937, prononcéeauStudienkreisdeBerlin(« Restaurationde 
l’Occident dans l’esprit aryen originel », in Totalité, octobre 1985, pp. 15-35). 
38. « HistoiresecrètedelaRomeantique : les“Livressibyllins” », inTotalité, juin-août 1978. On 
notera qu’Evola range les Etrusques et les Pélasges parmi les peuples non indo-européens, 
affirmationpour lemoinsdiscutable(et d’ailleursaujourd’hui deplusenplusdiscutée). L’élément 
grec, prisglobalement, apar ailleurstoujoursbeaucoupmoinsretenusonattentionquel’élément 
romain. 
39. Les hommes au milieu des ruines, op. cit., p. 34. 
40. Onreconnaît ici l’influencedeBachofen, enmêmetempsquel’idée, aujourd’hui àpeuprès 
abandonnée(sinondanscertainsmilieuxféministes), selonlaquellelecultededivinitésfémininesou 
l’existenced’unsystème defiliationmatrilinéairevanécessairement depair avec une véritable 
« gynécocratie », c’est-à-direuneautoritéprépondérantedesfemmesdansledomainepolitiqueet 
social. Cf. JuliusEvola, Il matriarcatonell’operadi J.J. Bachofen, FondazioneJuliusEvola, Roma 
1990. Acepoint deladémonstration, Evolasegardebiend’évoquer l’omniprésent patriarcat de 
l’ancienIsraël. Il oubliepareillement que, danslepanthéonindo-européen, lesdieuxneseposent 
nullement comme en « adversaires » des divinités féminines. 
41. Révolte contre le monde moderne, op. cit., p. 259 (« composante dissolvante »). 
42. Masqueset visagesduspiritualismecontemporain. Analysecritiquedesprincipauxcourants 
modernesversle« suprasensible », Pardès, Puiseaux1991, p. 140. Evola, commeonl’avu, va 
jusqu’à attribuer une nature « féminine » à l’« idéal sacerdotal », opinion qui ne pouvait que 
scandaliserRenéGuénon. S’éprouvant lui-mêmecommeun« guerrier », il affirmequel’élément viril 
réside, nondanslesacerdoce,maisdanslaroyauté,cequi l’amèneàdéfinirle« typeroyal »comme 
le« typemâlequi détermineet dominelasubstanceoriginelleconçuecommemèreet comme 
femelle »(« Autoritéspirituelleet pouvoir temporel », inJuliusEvola, « Krur »1929, op. cit., p. 182). 
« Laroyauté,écrit-il encore, alaprimautésurlesacerdoce, précisément comme, danslesymbole, le 
soleil a la primauté sur la lune, et l’homme sur la femme » (Révolte contre le monde moderne, op. cit., 
p. 112). 
43. Révolte contre le monde moderne, op. cit., p. 346. 
44. Les hommes au milieu des ruines, op. cit., p. 35. 
45. Ibid., p. 39. 
46. Chevaucher le tigre, Guy Trédaniel, Paris 1982, p. 188. 
47. « Eticità dell’autarchia », in Il Regime fascista, 7 juin 1938. 
48. Métaphysique du sexe, op. cit., pp. 15-16.
49. Op. cit., p. 73. 
50. Ibid., p. 101. 
51. Révolte contre le monde moderne, op. cit., p. 264. 
52. Le chemin du Cinabre, op. cit., p. 59. 
53. Op. cit., p. 62. 
54. Les hommes au milieu des ruines, op. cit., p. 37. 
55. Orientations, op. cit., p. 54. 
56. Le chemin du Cinabre, op. cit., p. 9. 
57. Teoriadell’Individuoassoluto, Bocca, Torino1927 ; Fenomenologiadell’Individuoassoluto
Bocca, Torino1930. Cf. aussi lesécritsdecettepérioderassemblésinJuliusEvola, L’Idealismo 
Realistico, 1924-1928, éd. par Gianfranco Lami, Antonio Pellicani, Roma 1997. 
58. Lettre à Mircea Eliade, 28 mai 1930. 
59. Le chemin du Cinabre, op. cit., p. 9. 
60. Les hommes au milieu des ruines, op. cit., p. 53. 
61. Louis Dumont, Homo aequalis. Genèse et épanouissement de l’idéologie économique
Gallimard, Paris1977 ; Essaissur l’individualisme. Uneperspectiveanthropologiquesur l’idéologie 
moderne, Seuil, Paris 1983. 
62. « “Cavalcarelatigre”et l’individualismodi JuliusEvola », inLaSocietàdegli individui, 1998, 3, 
p. 77. 
63. Leshommesaumilieudesruines, op. cit., p. 52. Cf. aussi la4epartiedeChevaucherletigre
intitulée« Dissolutiondel’individu ». Danssonlivrede1928, Impérialismepaïen, Evolareprend 
encore ses thèses sur l’« individu absolu », déclarant déplorer avant tout « la décadence, en 
Occident, delavaleurdel’individualité ». « Bienquecelapuissesemblerétrange, écrit-il, ontrouveà 
labasedenotreimpérialismedesvaleursqui apparaissent également commeprésupposéesparles 
formeslibéralesdeladémocratie.Ladifférencetient aufait que, danslelibéralisme, cesvaleurssont 
affirméespar uneraced’esclaves[sic] qui n’osepaslespenser et lesvouloirjusqu’aubout, pouret 
dansl’individu, maisqui lesdéplaceaucontraire, defaçonillégitimeet égalitariste, àla“société”et à 
l’“humanité” ». Il est révélateur qu’Evola, dans ce passage, loin de dénoncer les présupposés 
individualistes deladoctrinelibérale, reprocheaucontraireaulibéralismedenepas oser « les 
penseret lesvouloirjusqu’aubout ». Cetteabsolutisationdel’individu—paroppositionaupeuple—, 
qui menaceàtout instant deverserdanslesolipsisme, abienéténotéeparPhilippeBaillet, qui écrit
àproposd’Impérialismepaïen : « L’“individualisme” nietzschéenest ici tendujusqu’àlacaricature : 
certainspassages[...] paraissent simplement ériger enphilosophiepersonnelleuneagoraphobie 
absolue. La“socialité”, dont l’origineest attribuéesansmoyentermeauchristianismeprimitif, est ici 
synonymede“contamination”. Lacommunautén’existepas, ouplutôt seconfondaussitôt avecla 
“collectivité” abhorrée. Le “peuple” est une fiction, un flatus voici que démasque la lucidité 
nominaliste : il s’identifieàlamasse, qui n’est rientant qu’ellen’apasétémodeléeparlavolontédes 
“dominateurs”, des“maîtres”. Il faut insister sur cetteabsencetotalededimensioncommunautaire. 
Enoncéeici sous uneformeextrémiste, l’“asocialité” évoliennenefera quechanger demodes 
d’expression, maisnondestatut, dans toutel’œuvrepostérieure »(« Commeunebouteilleàla 
mer... », préfaceàJuliusEvola, Impérialismepaïen, Pardès, Puiseaux1993, p. 19). Dansunautre 
textesur Evola, PhilippeBaillet ajoute : « Enrejetant danssajeunesse(et ennerevenant jamais 
vraiment surcerejet)latraditionréalisteou“objectiviste”delaphilosophieclassique[...] auprofit du 
“contingentisme” del’individuabsoluqui affirmelalibertésuprêmeduMoi jusquepar l’arbitraire, 
[Evola] entrait nécessairement dansl’orbitedu“culte” fascistedel’action, entendudanssonsensle 
plusprofond : l’activismecommesolipsismevécu, enacte[...] Lesolipsismeévolien, indissociable 
d’unitinérairetrèspersonnel oùunecertaineesthétiqueentrepour unepart nonnégligeable, est 
aussi à notre sens lacause première, par le relativismequi lui est inhérent, de l’impossibilité 
intrinsèque, et nonaccidentelle, devoir naîtreunjour, àpartir del’œuvred’Evola, uneécolede 
penséeautonome, auxcontoursclairement définiset auxobjectifsunitaires »(« JuliusEvolaet les 
“électronslibres”. Autour duDossier HconsacréàJuliusEvola », inPoliticaHermetica, 12, 1998, p. 
266). 
64. « Les deux visages du nationalisme », in Essais politiques, op. cit., p. 56. 
65. « Traditionet réaction : lafiguredeJuliusEvola », inMil neuf cent, 9, 1991, p. 93. Onpeut 
noter quel’undesrapportssecretssur Evolarédigésdanslecadredel’Ahnenerbe, rapport qui fut 
adresséendatedu31août 1938àHimmler, fait état deson« individualismeextrême »et deson 
« individualismeabsolu ». Cf. BrunoZoratto, Julius Evolanei documenti segreti dell’Ahnenerbe
Fondazione Julius Evola, Roma 1977, pp. 35-43. 
66. « Les deux visages du nationalisme », art. cit., p. 56. 
67. Les hommes au milieu des ruines, op. cit., p. 83. 
68. Les hommes au milieu des ruines, 2e éd., op. cit., p. 66. 
69. Ibid., p. 239. 
70. « L’Etat et le travail », in Explorations. Hommes et problèmes, Pardès, Puiseaux 1989, p. 42. 
71. Les hommes au milieu des ruines, op. cit., p. 66. 
72. « Fonctionet signification del’idéeorganique », in Julius Evola, levisionnairefoudroyé
Copernic, Paris 1977, p. 56. 
73. « L’Etat et le travail », art. cit., p. 35. 
74. Le fascisme vu de droite, op. cit., p. 59.
75. « Ladroiteetlaculture »,inExplorations,op.cit., p. 280.Cf.aussi JuliusEvola, Citazioni sulla 
Monarchia, Thule, Palermo 1978. 
76. Onrappelleraici que, danslecasdelaFrancetout aumoins, lesrelationsentreleroi et 
l’aristocratieont étéplusquefréquemment conflictuelles : lessouverainsfrançaisont constamment 
luttécontreles« féodaux ». HermanndeKeyserling, pour qui JuliusEvolan’avait guèred’estime, 
écrit desoncôté : « Lesaristocratessont toujourspareux-mêmesrépublicains ; laformenormalede 
l’Etat pour lespeuplesàstructurearistocratiqueest, par conséquent, larépubliqueet nonpasla 
monarchie, car celui qui alaconscienceseigneurialenesupportequedifficilement au-dessusdelui 
quelqu’unqui secroit supérieur »(L’analysespectraledel’Europe, Gonthier-Médiations, Paris1965, 
p. 156). 
77. Théorie du pouvoir politique et religieux [1796], UGE/10-18, Paris 1966, p. 21. 
78. Parlant duchristianisme, il lui est toutefoisarrivéd’écrireque« lerejet, ledétachement violent 
delanaturemènent àsadésacralisation, àladestructiondelaconceptionorganiquedumonde 
commecosmos »(L’arcet lamassue, op. cit., p. 202). Maisonvoit mal comment ceslignesse 
concilient avecsesappelsconstantsenfaveurd’unedominationparl’élément « viril »detout cequi 
est del’ordredelaseule« nature ». DansChevaucher letigre, Evolaprécise : « Tout “retour àla 
nature” (formulequi, généralisée, peut aussi incluretouteslesrevendicationsaunomdesdroitsde 
l’instinct, del’inconscient, delachair, delavieinhibéepar l’“intellect” et ainsi desuite) est un 
phénomène de régression » (op. cit., p. 154). 
79. Lepremierlivred’Evolatraduit enlangueallemande, Imperialismopagano(Atanor, Todi- 
Roma1928), fut publiédansuneversionréviséeet largement modifiéepar l’auteur par unemaison 
d’éditiondirectement liéeauxmilieuxvölkisch : Heidnischer Imperialismus, Armanen, Leipzig1933 
(retraduction en italien de la version allemande : « Heidnischer Imperialismus », Centro Studi 
Tradizionali, Treviso1991). Sur lesrapportsd’EvolaaveclaRévolutionconservatrice, cf. aussi H.T. 
Hansen, « JuliusEvolaunddiedeutscheKonservativeRevolution », inCriticón, Munich, avril-juin 
1998, pp. 16-32. 
80. Plusieursthéoriciensvölkisch, parmi lesquelsErnst Bergmannet surtout HermanWirth, dont 
Evolaappréciait lestravauxsur lesorigines« atlanto-occidentales »delacivilisationeuropéenne, 
soutenaient encequi concernelapolaritémasculin-féminl’idée, totalement opposéeàlasienne, 
d’unenette supériorité des valeurs féminines sur les valeurs masculines. Cf. Ernst Bergmann, 
Erkenntnisgeist undMuttergeist. EineSoziosophieder Geschlechter, FerdinandHirt, Breslau1932 ; 
HermanWirth, DerAufgangderMenschheit. UntersuchungenzurGeschichtederReligion, Sumbolik 
und Schrift der Atlantisch-Nordischen Rasse, Eugen Diederichs, Jena 1928. 
81. Danssoncélèbrelivre, DerGeist alsWidersacherder Seele, dont l’influencefut considérable 
auseindelaRévolutionconservatrice, LudwigKlagesaprécisément pudécrirel’« esprit »commele 
pire adversaire de l’« âme ». 
82. Révolte contre le monde moderne, op. cit., p. 65. 
83. Cf. JuliusEvola, L’« Operaio »nel pensierodi Ernst Jünger, ArmandoArmando, Roma1960 
(2e éd. : Giovanni Volpe, Roma 1974 ; 3e éd. : Mediterranee, Roma 1998). 
84. Cf. OswaldSpengler, Il tramontodell’Occidente, Longanesi, Milano1957. Letextedela
préface d’Evola a été réédité, avec deux autres, in Julius Evola, Spengler e il Tramonto 
dell’Occidente, Fondazione Julius Evola, Roma 1981. 
85. JuliusEvola, Il fascismo. Saggiodi unaanalisi criticadal puntodi vistadellaDestra, Giovanni 
Volpe, Roma1964 ; 2e éd. : Il fascismovistodellaDestra. Notesul TerzoReich, Giovanni Volpe, 
Roma1970. Cf. aussi PhilippeBaillet, « LesrapportsdeJuliusEvolaaveclefascismeet lenational- 
socialisme », in Politica Hermetica, 1, 1987, pp. 49-71. 
86. Onsait enoutreaujourd’hui, grâceauxdocumentsretrouvésdanslesarchivesdel’ancien 
ministèredelaCulturepopulaire(« Minculpop »), d’abordquesongradedelieutenant lui fut retiréen 
avril 1934aprèsqu’il eut refusédesebattreenduel avecunjeunejournalistedunomdeGuglielmo 
Danzi qui s’était déclaréhostileàsesvues, et d’autrepart qu’il demandaendécembre1939à 
adhérerauParti national fasciste(PNF)afindepouvoirseportervolontairesurlefront, demandequi 
fut officiellement rejetéeenavril 1943parlaCourcentralededisciplineduparti, aumotif que« toute 
l’activitéculturelled’Evola, tellequ’elleémergedesinformationsrecueillieset decequel’onconnaît 
desesécritset desesdiscourslaissefortementdouterdesonadhésioninconditionnelleàladoctrine 
fasciste ». Cf. DanaLloydThomas,« QuandoEvolafudegradato »,inIl Borghese,24mars1999, pp. 
10-13. 
87. LesdixnumérosdeLaTorreont fait l’objet d’uneréimpressionintégrale : LaTorre. Fogliodi 
espressioni varie e di tradizione una, Il Falco, Milano 1977. 
88. Ycomprispar Evolalui-même, qui lesareprisesdanssonautobiographie. Cf. Lechemindu 
Cinabre, op. cit., p. 95. 
89. « Autodéfense », inTotalité, octobre1985, p. 87. « Si lesidées“fascistes”doivent êtreencore 
défendues,lit-onégalementdansLeshommesaumilieudesruines,ellesdevraientl’être, nonentant 
qu’ellessont “fascistes”, maisdanslamesureoùellesreprésentent, sousuneformeparticulière, 
l’expressionet l’affirmationd’idéesantérieureset supérieuresaufascisme »(op. cit., p. 26). Lefait 
qu’Evolaait reprispresquetextuellement danscelivresesproposde1951tendàmontrerqueceux- 
ci ne relevaient pas d’un discours de circonstance. 
90. Cf. notamment les Essais politiques, op. cit. 
91. Le chemin du Cinabre, op. cit., p. 146. 
92. Critiquant l’institution duService duTravail (Arbeitsdienst), Evolase déclarenotamment 
indignéqu’« unejeunefilledel’aristocratie[ait pu] ainsi seretrouver obligéedevivreencommun 
avecunepaysanneouuneprolétaire, dansunefermeouuneusine »(Lefascismevudedroite, op. 
cit., p. 172). 
93. BenitoMussolini, « Ladoctrinedufascisme », inLefascisme. Doctrine, institutions, Denoël et 
Steele, Paris 1933, p. 49. 
94. « LeSS,guardiae“Ordine“dellarivoluzionecrociuncinata », inLaVitaitaliana,août 1938. On 
noteraqueles« Ordensburgen »construitsdansl’Allemagnehitlériennen’avaient enfait strictement 
rienàvoir aveclaSS. Il s’agissait decentresdeformation, construitsàlademandeduFront du 
travail (Arbeitsfront), àl’intentiondesseulsmembresduparti. C’est àtort quePhilippeBaillet aparlé, 
commebeaucoupd’autres, des« fameux“Châteauxdel’Ordre” delaSS »danssapréfaceàla
premièreéditionfrançaiseduFascismevudedroite(CercleCultureet liberté, Paris1981, p. 15). 
Nousavonsfait allusionplushaut (note65) aurapport adresséàHimmlerenaoût 1938, aumoment 
mêmeoùparaissait l’articled’Evola. Cerapport concluait àl’incompatibilitédesidéesdeJuliusEvola 
aveclenational-socialisme. Cf. BrunoZoratto, JuliusEvolanei documenti segreti dell’Ahnenerbe, op. 
cit. ; GianfrancodeTurriset BrunoZoratto(éd.), JuliusEvolanei rapporti delleSS, FondazioneJulius 
Evola, Roma2000. Cf. aussi FrancescoGerminario, Razzadel sangue, razzadellospirito. Julius 
Evola, l’antisemitismoeil nazionalsocialismo, 1930-1945,Bollati Boringhieri, Torino2001. Rappelons 
parailleursquetoutelalumièreest encoreloind’avoirétéfaitesurlescontactsqu’Evolaapunouer 
en Allemagne et en Autriche avant 1945. 
95. Cequereconnaîtd’ailleursEvolalorsque, évoquantlesrèglesdeviedesmembresdelaSS,il 
écrit : « Ainsi seréaffirmait lebiologismeraciste, liéàunecertainebanalisationdel’idéal féminin, un 
relief particulier étant donnéàl’aspect “mère” delafemme »(Lefascismevudedroite, op. cit., p. 
207). 
96. « LesrapportsdeJuliusEvolaaveclefascismeet lenational-socialisme », art. cit., p. 60. Par 
manquedeplace, nousnepouvonsici quefaireallusionàl’intérêt portéparEvolaàlaGardedeFer 
et auMouvement légionnaireroumain(laLégiondel’archangesaint Michel). Onsait qu’Evolaa 
témoigné d’une admiration presque inconditionnelle envers Corneliu Codreanu, le chef de ce 
mouvement, enallantjusqu’àvoirenlui l’« archétypemêmearyo-romain »(« LatragédiedelaGarde 
deFer », inTotalité, 18-19, 1984, p. 180). Cf. aussi JuliusEvola, LatragediadellaGuardiadi Ferro
FondazioneJuliusEvola, Roma1996 ; ClaudioMutti, JuliusEvolasul frontedell’Est, All’insegnadel 
Veltro, Parma1998. Mais, commel’abiennotéJean-Paul Lippi, cet élogelaisseperplexesi l’ontient 
compteducaractèreprofondément chrétiendumouvement légionnaireet surtout desoncaractère 
mystique, Evolaayant toujoursdénoncédanslamystique, cemouvement del’âme, unélément 
relevant de la « spiritualité lunaire » et du « pôle féminin de l’esprit ». 
97. « L’influenzadi Evolasullagenerazionechenonhafattointempoaperderelaguerre », in 
Gianfranco de Turris (éd.), Testimonianze su Evola, 2e éd., Mediterranee, Roma 1985, p. 132. 
98. « La Droite et la Tradition », in Explorations, op. cit., p. 305. 
99. Le fascisme vu de droite, op. cit., p. 124. 
100. Ibid., p. 61. 
101. Orientations, op. cit., p. 85. 
102. « Dansuncertainsens, l’américanisme, pournous, est plusdangereuxquelecommunisme : 
parcequ’il est unesortedecheval deTroie »(Orientations,op. cit., p. 61). Evolaveutclairement dire 
par làquecequel’onpeut leplusreprocher àl’« américanisme », c’est deconduireendouceur au 
bolchevisme... 
103. Chevaucher le tigre, op. cit., p. 15. 
104. Le chemin du Cinabre, op. cit., pp. 195 et 201. 
105. Le fascisme vu de droite, op. cit., p. 21.
106. Le chemin du Cinabre, op. cit., p. 210. 
107. Chevaucher le tigre, op. cit., p. 215. 
108. Le chemin du Cinabre, op. cit., p. 195. 
109. Orientations, op. cit, p. 94. 
110. Laformule« chevaucher letigre »acependant puêtreinterprétéedanscertainsmilieux 
politiques activistes commesusceptibledelégitimer undésir, nonplus derectifier lecours des 
choses, maisaucontrairedel’accélérer : puisquelafindecycledoit detoutefaçonadvenir,autant la 
hâter pour ensortir plusvite. Lestenantsdecettepositionsesont parfoisappuyéssur cequ’Evola, 
enréférenceauxdoctrinestantriques, aappeléla« VoiedelaMaingauche », manièred’agircensée 
intensifier lesprocessusjusqu’àcequ’ilssetransforment enleur contraire, selonle« principedela 
“transformationdestoxiquesenmédicaments” »(JuliusEvola, « Sexeet contestation », inJulius 
Evola,levisionnairefoudroyé,op.cit.,p. 119).Evolaatoutefoislui-mêmerejetécetteinterprétation.Il 
souligneeneffet quelaVoiedelaMaingauchenepeut êtreempruntéequesur unplanspirituel, 
pour œuvrer àladestructiondumoi qui seulepermet d’accéderàl’absolu. « Danslecontextedont 
noustraitons, précise-t-il, l’idéede“destruction”est associéeàcellede“transcendance” : il nes’agit 
doncpasdedétruirepour détruire, maisdedétruirepour transcender »(« Sur la“VoiedelaMain 
gauche” », inExplorations, op. cit., p. 144). Revenant sur l’expressionde« chevaucher letigre », il 
souligneégalement, danssonautobiographie, que « danscelivre, laformules’appliqueuniquement 
auxproblèmesintérieursdelapersonne, àsoncomportement, àsonagiret réagirdansuneépoque 
de dissolution, sans aucune finalité extérieure, sans même avoir en vue l’avenir, c’est-à-dire 
l’éventuellefermetured’uncycleet lecommencement d’unnouveaucycle »(LecheminduCinabre
op. cit., p. 196 ; nousavonscorrigéledébut delatraductionfrançaisedecepassage, qui indiqueà 
tort : « la formule n’est appliquée aux problèmes intérieurs... »). 

111. Le chemin du Cinabre, op. cit., pp. 204-205. 
112. Le chemin du labyrinthe. Souvenirs d’Orient et d’Occident, Robert Laffont-Opera Mundi, Paris 
1981, p. 340. 
113. Orientations, op. cit., p. 59. 
114. Les hommes au milieu des ruines, op. cit., p. 107. 
115. Op. cit., p. 107. 
116. « Ladécadence, écrit-il par exemple, apparaît commelesensdel’histoire[soulignépar 
nous], enceci qu’onconstate,auseindel’histoire, ladisparitiondescivilisationsdetype“traditionnel” 
et l’avènement deplusenplusprécis, général, planétaire, d’unenouvellecivilisationcommunede 
type moderne » (« Le problème de la décadence », p. 53). 
117. « L’avènement du “cinquième état” », in Explorations, op. cit., p. 27.
118. « Fonctionet significationdel’idéeorganique », art. cit., p. 60. Pierre-AndréTaguieff noteà 
ce propos qu’« il suffit d’intervertir les signes pour [...] retrouver la loi fondamentale de la 
métaphysique de l’histoire » (« Julius Evola penseur de la décadence », art. cit., p. 28). 
119. Le gai savoir
120. Les hommes au milieu des ruines, op. cit., p. 90. 
121. Ibid., p. 96. 
122. Ibid., p. 90. 
123. Ibid., p. 55. 
124. Ibid., p. 56.

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